Page:Strauss David - Vie de Jésus, tome 1, Ladrange 1856.djvu/234

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récits du Nouveau Testament, échapper à l’explication naturelle. Si, dans l’ancienne Église, la croyance aux miracles était si démesurément forte qu’elle ne s’arrêtait pas au Nouveau Testament, qu’elle allait jusqu’à embrasser des relations apocryphes, et qu’elle s’aveuglait sur leur caractère évidemment non historique, le rationalisme positif de quelques apôtres des lumières modernes fut tellement excessif, qu’ils crurent pouvoir l’appliquer même aux miracles apocryphes. Tel fut l’auteur de l’Histoire naturelle du grand prophète de Nazareth : expliquant naturellement, sans hésiter, les récits de la descendance et de la jeunesse de Marie, il les a fait entrer dans le cercle de ses déductions[1]. De nos jours, où l’on comprend le caractère évidemment mythique de ces récits apocryphes, on jette un regard de compassion aussi bien sur les anciens Pères de l’Église que sur nos auteurs modernes d’explications naturelles. À la vérité, on y est autorisé en ce sens, que le caractère mythique ne peut être méconnu dans les récits apocryphes que par une grande ignorance. Mais, en y regardant de plus près, leur différence avec les récits canoniques sur les commencements de la vie de Jean-Baptiste et de Jésus ne paraît qu’une différence de forme ; de la même racine, que nous trouverons plus loin, sont sortis les uns comme rejetons sains et vigoureux, les autres comme pousses faibles et tout artificielles venues en arrière-saison. Toutefois, ces Pères de l’Église et ces auteurs d’explications naturelles avaient sur la majorité des théologiens actuels cet avantage, qu’ils ne se méprenaient pas sur la ressemblance fondamentale, et traitaient semblablement des narrations analogues, les expliquant ou toutes deux miraculeusement, ou toutes deux naturellement ; mais ils n’ont pas, comme c’est l’habitude aujourd’hui, expliqué les unes mythiquement et les autres historiquement.

  1. 1ter B., S. 119 ff.