Page:Strauss David - Vie de Jésus, tome 1, Ladrange 1856.djvu/253

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la vertu divine, quoique non pas physiquement, à la manière des païens.

Telle paraît donc être l’idée que les paragraphes évangéliques ici mentionnés veulent donner de l’origine de la vie de Jésus ; néanmoins, de graves difficultés ne permettent guère de la suivre jusqu’au bout. Nous pouvons distinguer les difficultés, que nous appellerons physico-théologiques, de celles qui naissent de l’exégèse historique.

Les difficultés physiologiques concourent à ce point : qu’une pareille naissance serait la plus extraordinaire déviation de toute loi naturelle. Autant la physiologie est incertaine sur les particularités du comment, autant il est sûr par une expérience sans exception que, par le seul concours de deux organismes humains de sexe différent, une vie humaine est produite. Aussi y aura-t-il toujours à faire valoir ici la phrase de Plutarque : Jamais femme n’est dite avoir eu un enfant sans le concours d’un homme[1], et à appliquer l’impossible de Cérinthe[2]. Ce n’est que dans les espèces les plus inférieures du règne animal que l’on connaît une propagation sans intervention sexuelle[3] ; et, la chose étant considérée uniquement au point de vue physiologique, on pourrait dire d’un homme né sans le concours des sexes, ce qu’Origène a dit dans le sens du plus haut supranaturalisme[4], que les mots du psaume 22, 7 : Je suis un ver et non un homme, sont une prophétie de la naissance de Jésus, en tant qu’engendré, comme ces êtres inférieurs, sans un concours sexuel. Mais à la considération purement physiologique, l’ange, dans Luc, ajoute déjà la considération théologique, à savoir (1, 37), que rien n’est impossible

  1. Παιδίον οὐδεμία ποτὲ γυνὴ λέγεται ποιῆσαι δίχα κοινωνίας ἀνδρός. Conjugial. præcept. Opp. ed. Hutten, vol. 7, p. 428.
  2. Irenæus adv. Hær., 1, 26 : Cerinthus Jesum subjecit non ex virgine natum, impossibile enim hoc ei visum est.
  3. C’est pourtant ce qui a été fait dans Henke’s neues Magazin, 3, 3, S. 369, Anmerk.
  4. Homil. in Lucam, 14. Quant à ceux qui font valoir que les premiers hommes aussi sont nés sans le concours des sexes, voyez mes Écrits polémiques, 1, 2, S. 72.