Page:Strauss David - Vie de Jésus, tome 1, Ladrange 1856.djvu/254

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à la puissance divine. La toute-puissance divine, ne faisant qu’un avec la sagesse divine, n’agit jamais sans motifs suffisants ; il faudrait donc pouvoir montrer ici un motif semblable. Or, pour suspendre une loi naturelle établie par lui-même, Dieu n’aurait de motif suffisant qu’autant que cette suspension serait indispensable à l’obtention de résultats dignes de lui. À cette objection l’on répond : Le but de la rédemption exigeait la pureté de Jésus ; or, pour être pur du péché, Jésus, par l’exclusion de la participation d’un père pécheur et par l’influence divine de sa conception, devait être soustrait à la tache du péché originel[1]. Mais on a déjà remarqué[2], et tout récemment Schleiermacher a fait voir, d’une manière qui décide de ce côté la question[3], que l’exclusion seule de la participation paternelle ne suffisait pas, et qu’il fallait aussi exclure la participation maternelle, non moins entachée du péché originel, à moins que l’on n’admit, avec les hérétiques valentiniens, que Jésus n’avait fait que traverser le corps de Marie. Or, si la participation maternelle demeure, comme c’est évident d’après les récits évangéliques, il faut, pour obtenir la pureté qu’on suppose nécessaire, admettre une opération divine qui sanctifie, lors de la conception de Jésus, la participation de la mère humaine et pécheresse. Mais, si Dieu purifiait de la sorte la participation maternelle, il était plus simple d’en faire autant pour la participation paternelle, que d’intervertir, en excluant cette dernière, aussi énormément la loi de la nature, et dès lors on ne peut plus soutenir qu’il était nécessaire que Jésus fût conçu sans père pour être pur du péché.

Celui-là même qui croit pouvoir se dérober aux difficultés jusqu’ici exposées, en s’enveloppant dans un supranatura-

  1. Voyez Olshausen, l. c., S. 49 f. Neander, L. J. Chr. S. 16. Quant à l’Essai de Bauer, Jahrbücher f. wiss. Krit. 1835, Dec. n. 111, pour rendre cet argument plus élevé et plus spéculatif, j’ai montré dans mes Écrits polémiques, 1, 3, S. 104, la confusion où il est tombé.
  2. Par exemple Eichhorn, Einleitung in das N. T., 1. Bd., S. 407.
  3. Glaubenslehre, 2. Thl., § 97, S. 73 f, der zweiten Auflage.