Aller au contenu

Page:Strauss David - Vie de Jésus, tome 1, Ladrange 1856.djvu/273

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

1, 22 et suiv., on voit en outre que le passage d’Isaie 7, 14, était rapporté à Jésus dans la première église chrétienne. Jésus, disait-on, doit, conformément à ce passage, naître, comme Messie, d’une vierge par une opération divine ; ce qui devait être, concluait-on, est aussi arrivé véritablement, et de cette façon se développa un mythe philosophique (dogmatique) sur la naissance de Jésus. L’explication mythique laisse l’histoire réelle de Jésus dans sa vérité : Jésus est né d’un mariage régulier entre Joseph et Marie, ce qui sauve, ainsi qu’on le remarque avec raison, aussi bien la dignité de Jésus que le respect dû à sa mère[1].

On a donc, pour expliquer la formation d’un tel mythe, songé au penchant qui portait le monde ancien à représenter de grands hommes, bienfaiteurs de l’espèce humaine, comme fils des dieux. Les exemples ont été accumulés par les théologiens ; on a rappelé, dans la mythologie et l’histoire gréco-romaine, le souvenir d’Hercule, de Castor et Pollux, de Romulus, d’Alexandre, et surtout de Pythagore[2] et de Platon. Saint Jérôme s’est exprimé sur ce dernier d’une façon tout à fait applicable à Jésus : Sapientiæ principem non aliter arbitrantur, nisi de partu virginis editum[3].

On pourrait donc conclure de ces exemples que le récit de la conception surnaturelle de Jésus est né, sans aucune réalité historique, d’une semblable tendance ; mais les orthodoxes et les rationalistes s’accordent, quoique par des motifs fort différents, pour contester cette analogie. S’il

  1. Gabler, Neuest. theol. Journal, 7, 4, S. 408 ; Eichhorn, Einleit. in das N. T., 1, S. 428 f. ; Bauer, Hebr. Mythol., 1, 192, e, ff. ; Wegscheider, Instit., § 123 ; De Wette, Bibl. Dogmat., § 281, et Exeget. Handbuch., 1, 1, S. 18 ; Kaiser, Bibl. Theologie, 1, S. 231 ff, ; Ammon, Fortbildung, S. 201 ; Hase, L. J., § 33 ; Fritzsche, Comm. in Matth., p. 56. Ce dernier dit avec justesse, dans le titre du premier chapitre, p. 6 : Non minus ille (Jesus), ut ferunt doctorum judaicorum de Messia sententiæ, patrem habet spiritum divinum, matrem virginem.
  2. Iamblich., Vita Pythagoræ, cap. 2, edit. Kiessling.
  3. Adv. Jovin., 1, 26. Diog. Laert., 3, 1, 2.