Page:Strauss David - Vie de Jésus, tome 1, Ladrange 1856.djvu/308

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voisinage de la ville, elle donne des signes tantôt de tristesse, tantôt de joie ; interrogée, elle répond qu’elle voit devant elle deux peuples, l’un pleurant, l’autre riant. C’est ainsi que jadis deux nations ennemies se heurtaient dans le sein de Rébecca, 1 Mos., 25, 23. D’après une des explications[1], les deux peuples signifiaient les deux parties d’Israël, à l’une desquelles l’apparition de Jésus sera une occasion de chute, εἰς πτῶσιν (d’après Luc, 2, 34), et à l’autre une occasion d’élévation, εἰς ἀνάστασιν ; d’après la seconde explication[2], ils signifient le peuple des Juifs, qui plus tard rejeta Jésus, et le peuple des païens, qui l’accueillit. Bientôt après, Marie est prise des douleurs de l’enfantement, en dehors de Bethléem, comme il semble d’après le contexte et d’après plusieurs variantes. Joseph la conduit dans une caverne située près du chemin ; et là, au milieu d’une pause solennelle de la nature entière, cachée par un nuage lumineux, elle met au monde son enfant. Des femmes appelées à son secours la trouvent vierge même après la délivrance.

La légende de la naissance de Jésus dans une caverne est connue déjà de Justin[3] et d’Origène[4]. Pour l’accorder avec le récit de Luc, qui dit que Jésus naquit dans une crèche, φάτνη, ils supposent qu’il se trouvait une crèche dans la caverne. Plusieurs modernes admettent cette supposition[5], tandis que d’autres aiment mieux que la caverne soit ce que Luc appelle φάτνη, dans le sens de magasin à fourrage[6]. Justin[7], pour la naissance dans la caverne, invoque la prophétie d’Isaïe, 33, 16 : Le juste habitera dans la caverne élevée de la forte pierre, οὗτος οἰκήσει ἐν ὑψηλῷ σπηλαίῳ πέτρας ἰσχυρᾶς. De même l’Hist. de la nat. de Marie, racon-

  1. Fabricius dans Codex apocryphus N. T. 1, p. 105, not. y.
  2. Protev. Jac., c. 17.
  3. Dial. c. Tryph. 78.
  4. C. Cels. 1, 51.
  5. Hess, Geschichte Jesu, 1, S. 43. Olshausen, bibl. Comm. 1, S. 132.
  6. Paulus, Exeget. Handbuch, S. 182.
  7. Dial. c. Tryph. 70 et 78.