Page:Strauss David - Vie de Jésus, tome 1, Ladrange 1856.djvu/424

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avaient reçues, et enfin quel fut le but de ces communications, si elles n’ont pas réglé la vie ultérieure des deux enfants[1] ?

Accordera-t-on que le quatrième évangile n’exclut qu’une chose, à savoir, que Jean-Baptiste ait connu la messianité de Jésus ; que le troisième évangile au contraire ne suppose qu’une chose, à savoir, que Jean-Baptiste ait connu sa personne ? cela ne suffit pas encore pour résoudre la contradiction des évangiles. Car, dans Matthieu, Jean, au moment où il va baptiser Jésus, parle comme s’il le connaissait, non seulement personnellement, mais encore positivement dans son caractère de Messie. Il refuse, en effet, de le baptiser, et il lui dit : J’ai besoin d’être baptisé par toi, et c’est toi qui viens vers moi, ἐγὼ χρείαν ἔχω ὑπὸ σοῦ βαπτισθῆναι, καὶ σὺ ἔρχῃ πρός με (3, 14). On a essayé d’expliquer ces paroles dans le sens de l’harmonistique, en disant que Jean a voulu seulement exprimer l’excellence supérieure de Jésus, mais non pas sa messianité[2]. Mais, quelque excellence morale que Jean-Baptiste ait pu reconnaître en Jésus, il lui a été impossible, tant qu’il l’a considéré comme un homme pécheur, de l’affranchir du devoir de se soumettre à son baptême. Et même le droit de distribuer la lustration qui préparait au règne du Messie ne pouvait pas être obtenu simplement par une haute supériorité morale ; une vocation particulière était nécessaire, telle que Jean lui-même l’avait reçue et telle qu’elle ne pouvait tomber, d’après les idées juives, que sur un prophète ou sur le Messie et sur son précurseur (Joh., 1, 19, seq.). Si donc Jean attribuait à Jésus la qualification nécessaire pour baptiser, il dut non pas seulement le regarder, en général, comme un homme excel-

  1. En désespoir de cause, Osiander répond que ces communications divines ont bien pu renfermer des indications de tenir… les deux enfants séparés ! (S. 127.)
  2. Hess, Geschichte Jesu, 1, S. 117 f. ; Paulus, l. c., S. 366 ; Neander, S. 64 ff.