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§ II.


Différentes explications des légendes divines chez les Grecs.

On ne peut pas dire que la religion hellénique ait reposé sur des documents écrits. Elle avait cependant quelque chose de semblable, par exemple dans Homère et Hésiode ; et, comme ces poëmes, la légende traditionnelle a dû éprouver les différentes explications dont il s’agit à mesure que la culture du peuple grec s’est développée. De bonne heure, la sévère philosophie grecque, et, par elle, quelques poëtes, sentirent en eux-mêmes que la divinité n’avait pas pu se manifester sous une forme humaine aussi tangible, ni avec autant de grossièreté qu’on le voyait dans les luttes sauvages de la Théogonie d’Hésiode et dans les interventions commodes des dieux homériques. De là vint la querelle de Platon, et avant lui, de Pindare avec Homère[1] ; de là vint qu’Anaxagore, à qui l’on a voulu attribuer l’invention de l’explication allégorique, rapportait les poésies homériques à la vertu et à la justice[2] ; que les stoïciens interprétaient la Théogonie d’Hésiode comme le jeu des éléments naturels, dont l’unité suprême constituait pour eux l’essence divine[3]. Ainsi ces penseurs admettaient, à la vérité, dans les légendes, une signification intrinsèque et absolue, chacun d’après sa manière de voir, les uns une signification physique, les autres une signification morale ; mais ils en rejetaient la forme, en tant que fait et histoire[4].

  1. Platon, De republ., 2, p. 377, f. Steph. Pindare, Nem., 7, 31. Comparez, sur ce sujet et sur ce qui suit, Baur, Symb. und Myth., I, S. 343 ff., et O. Müller, Prolegomena zu einer wissenschaftlichen Mythologie, S. 86 ff. 99 f.
  2. Diog. Laert., l. 2, c. 3, n. 7.
  3. Cic., De nat. Deor., 1, 10, 15. Comparez Clément, Hom. vi, 1, et suiv.
  4. Plusieurs contradicteurs, Hofmann (das Leben Jesu von Dr. Strauss, geprüft, S.38), Lange (über den geschichtlichen Character der kanonischen Evangelien, insbesondere der Kindheitsgeschichte Jesu, mit Beziehung auf das L. J., von D. F. Strauss, S. 1), et Osiander (Apolog. des L. J. gegen den neuesten Versuch, es in Mythen aufzulösen, S. 10) se sont élevés contre cet appel à la mythologie grecque. Ils ont fait valoir les différences essentielles des religions païennes avec la religion judéo-chrétienne et des motifs qui, d’une et d’autre part, conduisirent à