Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 2.djvu/138

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— D’immenses et de toutes sortes…

— Vraiment ?

— D’abord, vous savez que, dès qu’une célèbre courtisane arrive dans une ville, ces honnêtes commères, dont votre obligeant Mercure est le patron… Encore un fort aimable dieu que celui-là…

— Ils sont tous ainsi, sauf le bonhomme Pluton… et encore s’amuse-t-il parfois à chiffonner les Parques.

— Je disais donc que, dès l’arrivée d’une nouvelle courtisane, ces honnêtes commères dont nous parlons, se rendaient aussitôt près d’elle pour lui offrir leurs services.

— Sans doute, de même que les courtiers vont faire leurs offres aux capitaines de tous les navires entrant dans le port ; c’est la règle du commerce.

— Eh bien ! non-seulement ces honnêtes commères n’ont pas été reçues par la belle Gauloise, mais elles ont été brutalement accueillies, et non moins brutalement chassées par un vieil eunuque méchant comme un cerbère.

— Hum !… cela commence à devenir très-inquiétant pour vous, mon cher Norbiac.

— Ce n’est pas tout ; car vous saurez que j’ai dix espions en campagne.

— Bonne précaution.

— La belle Gauloise habite une petite maison près du temple de Diane ; mes espions n’ont pas quitté son logis de l’œil, depuis le jour où je l’ai vue au cirque et où elle a produit une si profonde sensation…

— C’est la vérité… j’y étais… Vous disiez, cher Norbiac, que vos espions…

— Se sont relayés nuit et jour, et, sauf deux servantes, ils n’ont vu sortir ni entrer personne chez la Gauloise… Je ne sais combien de litières, de chars, de cavaliers, se sont arrêtés à sa porte ; mais toujours le vieil eunuque, la figure farouche, les renvoyait sans vouloir entendre à rien…