Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 2.djvu/225

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Et Faustine disparut avec sa victime dans l’ombre de la voûte du nord, au milieu des acclamations frénétiques des spectateurs.

Cela s’était passé si rapidement, que Sylvest se crut le jouet d’un songe ; il éprouva une sorte de vertige, dont il fut tiré par le bruit des chaînes que les guichetiers et des soldats armés ôtaient à ses compagnons ; l’heure était venue de déferrer les condamnés aux bêtes féroces, dont les grondements redoublaient.

Sylvest, immobile auprès de la grille, regardait sans voir. Deux guichetiers le saisirent et firent tomber ses chaînes. Alors, pleurant malgré lui la mort de sa sœur, quoiqu’il eût désiré cette mort, il s’assit sur les dalles du souterrain, sa tête cachée dans ses deux mains, indifférent à ce qui se passait dans l’arène, où combattaient alors Bibrix et Mont-Liban. De temps à autre, de grandes rumeurs annonçaient les différentes chances du combat.

— Courage, Mont-Liban ! — criaient les uns, — courage !

— Courage, Bibrix ! — criaient les autres, — courage !

Puis enfin, au bout d’un assez long temps, une immense clameur de : — Victoire à Bibrix ! — fit trembler les murailles de l’amphithéâtre.

Mont-Liban venait de succomber dans cette lutte à mort…

Tout-à-coup Sylvest fut violemment heurté et foulé aux pieds par ses compagnons qui fuyaient pêle-mêle. Se relevant, non sans peine, pour n’être pas écrasé par eux, il vit dans l’ombre, et du fond de la voûte, s’approcher rapidement une sorte de muraille ardente de la hauteur d’un homme, barrant toute la largeur du souterrain.

Cette immense plaque de bronze, rougie au feu sur des brasiers roulants, chassait devant elle les condamnés. La grille qui les avait jusqu’alors séparés du cirque s’était enfoncée au-dessous du sol en glissant dans une rainure ; de sorte que ces malheureux, refoulés par la plaque ardente, ne pouvaient échapper à d’horribles brûlures qu’en se précipitant dans l’arène où bondissaient les bêtes féroces, et d’où Plutons, Mercures, hérauts et buccinateurs venaient de dis-