Aller au contenu

Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 2.djvu/233

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

tonde, plus les cris que de temps à autre poussait la victime devenaient distincts… si distincts… qu’il reconnut la voix de Siomara, étouffée de temps à autre par les chants et le bruit des lyres, des flûtes et des cymbales.

Loyse, effrayée, suivait son époux, n’essayant plus de le retenir… Tous deux arrivèrent bientôt près du portique circulaire dont le temple était entouré… Une vive lumière s’échappait des cintres à jour à travers lesquels, quatre nuits auparavant, Sylvest avait assisté invisible, à de monstrueux mystères… Soudain un dernier cri, plus affreux encore que les autres, mais déjà expirant, retentit au milieu du silence de la nuit, et fut suivi de ces mots, suprême appel prononcé d’une voix forte encore, bien que défaillante et haletante de douleur :

— Sylvest !… ma mère !… mon père !…

L’esclave, prenant son épée entre ses dents, s’élança, afin de grimper, ainsi qu’il l’avait fait, le long d’une des colonnes du portique. Une fois arrivé aux cintres à jour, qu’aurait-il fait ? il ne le sait ; car, en ce moment, il n’était possédé que d’une passion furieuse, celle d’aller au secours de Siomara, et de la venger par la mort de Faustine… Mais Loyse, de plus en plus épouvantée de l’exaltation de son époux, se cramponna de toutes ses forces à son bras, et l’empêcha de monter à la colonne, en lui disant tout bas avec un accent déchirant :

— Tu nous perds !… Songe donc à notre enfant !…

Sylvest tâchait de se dégager de l’étreinte de sa femme, et, sourd à sa prière, il allait poursuivre son projet insensé, lorsque soudain, après un moment de silence funèbre, il entendit la voix éclatante de Faustine s’écrier :

— Morte !… déjà morte !… Tu l’avais prédit toi-même, belle magicienne… que Siomara, ma rivale, tomberait en mon pouvoir… et expirerait sous ma main dans des tortures inconnues !… Ta prédiction est accomplie… te voilà morte… déjà morte !… Oui, morte…