Seigneur ; mais d’abord conte-nous le miracle, doctissime Symphorien.
— C’était en 537, environ quatre ans après que Childebert et Clotaire avaient tué leurs neveux à coups de couteau… Nos deux fils de Clovis, dignes de leur race, ne songeaient qu’à se dépouiller et à s’égorger les uns les autres ; aussi, un moment unis, en tendres frères, pour le meurtre de ces petits enfants (on n’a pas tous les jours de pareils sujets de bon accord), Clotaire et Childebert se déclarent la guerre. Theudebert, petit-fils de Clovis, se joignit à Childebert, et tous deux, à la tête de leurs leudes, ravageant, pillant, comme d’habitude, les contrées qu’ils traversaient, marchent contre Clotaire. Ce doux oncle, ne trouvant pas sa troupe assez nombreuse pour résister aux forces de son frère et de son neveu, refuse la bataille, et se retire dans la forêt de Brotonne, entre Rouen et la mer… Theudebert et Childebert cernaient la forêt, attendant la nuit, espérant prendre leur bien-aimé frère et oncle au trébuchet, et l’égorgeter gentillement… Attention, Ronan, voici le miracle qui vient !
— Voyons-le venir, doctissime Symphorien.
— Childebert et Theudebert s’avançaient donc sans bruit à la tête de leurs troupes… Le jour se lève… ils n’étaient plus qu’à deux à trois cents pas de l’endroit où le doux Clotaire campait avec ses leudes… lorsque soudain tombe du ciel une épouvantable pluie de pierres et de feu… Les troupes de Childebert et de Theudebert sont écrasées par les pierres et brûlées par le feu céleste…
— Et Clotaire ?
— Oh ! Clotaire, ce favori du Seigneur, grâce au miracle que je dis, voit, à trois cents pas de lui, la troupe de son frère anéantie sous la pluie de feu et de pierres, tandis qu’au-dessus de lui Clotaire, et de son armée, le ciel aussi pur, aussi limpide, aussi serein, que la conscience de ce doux oncle, est du plus riant azur : pas un souffle de vent n’agite même la cime des arbres de la forêt, tandis que tout autour de cet endroit privilégié, que le Seigneur couvre sans doute