entrer avec moi dans notre communauté de laboureurs y entreront ; ceux qui, préférant la vie de famille, voudront s’unir à une femme de leur choix, recevront de moi des terres héréditaires et fonderont la colonie… J’ai soigneusement visité la vallée… une rivière poissonneuse traverse ses vastes prairies, des bois séculaires l’ombragent, ce qui est cultivé par les esclaves du fisc royal en vigne et en blé est florissant ; les bestiaux sont nombreux. Ai-je besoin de vous le dire, mes frères, que ces pauvres esclaves transportés ou nés en ce pays, et que dans sa générosité sacrilège ce roi Clotaire me donne… pêle-mêle avec le bétail… seront affranchis par nous. Nous ne sommes pas des évêques pour garder ainsi notre prochain en esclavage et l’exploiter à notre profit ; ces esclaves redeviendront comme nous des hommes libres, les terres qu’ils ont jusqu’ici cultivées pour le fisc du roi leur appartiendront désormais à titre héréditaire. La vallée est immense, et fussions-nous trois fois plus nombreux, la fertilité de son sol suffirait à nos besoins ; ces terres que le roi Clotaire nous restitue, à nous Gaulois, sous forme de don, ont été violemment conquises il y a plus de deux siècles par des tribus barbares, puis envahies par les Burgondes, puis enfin reconquises sur ceux-ci par les Franks ; ces terres sont en partie incultes, la race de ceux qui les possédaient il y a deux cent cinquante ans et plus avant la première invasion barbare est, hélas ! depuis longtemps éteinte ; massacrées lors de ces conquêtes successives, emmenées au loin en captivité ou mortes à la peine en cultivant pour autrui les champs paternels, les premières populations ont disparu, les esclaves habitant aujourd’hui cette vallée descendent de ceux qui y ont été transportés pour la repeupler après la conquête de Clovis. En occupant cette portion du sol de la Gaule, nous, Gaulois, nous ne dépossédons personne de notre race ; mais ce territoire, il faudra savoir au besoin le défendre : en ces temps de guerre civile, les donations, quoique perpétuelles, souvent ne sont pas respectées par les héritiers des rois ou par les
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