Alix de Montmorency, levant vers le plafond son regard terne. — Seigneur, puisqu’il vous plaît de laisser mon époux dans cette vallée de larmes et de misères !... qu’il en soit ainsi !
Karvel arrête l’effusion du sang au moyen d’une bande qu’il roule autour du bras du comte ; puis, allant vers la cassette apportée par lui et déposée sur une table, il prend plusieurs fioles et compose un breuvage. L’état de Montfort s’améliore comme par enchantement ; il sort peu à peu de sa léthargie et pousse un profond soupir de soulagement. Le Parfait, ayant achevé la confection du breuvage, se rapproche et dit à la comtesse : — Soutenez, je vous prie, la tête de votre mari, madame, et aidez-moi à lui faire boire cette potion.
Alix de Montmorency obéit à Karvel ; quelques instants après l’action du breuvage se manifeste. Le regard de Montfort, jusqu’alors vague et errant, s’arrête sur le médecin ; il le contemple longtemps ; puis, tournant la tête vers la comtesse et levant péniblement son bras pour désigner le Parfait, il dit d’une voix faible et caverneuse : — Quel est cet homme ?
Alix de Montmorency. — C’est le médecin hérétique de Lavaur.
Simon, à ces mots, tressaille de surprise et d’horreur ; puis, fermant les yeux, il semble réfléchir. Karvel, après avoir déposé un flacon sur la table, referme la cassette, la prend, et dit à la comtesse : — Vous ferez, madame, durant cette nuit, boire d’heure en heure, à votre mari, quelques gorgées du breuvage contenu dans ce flacon… cela suffira, je pense, à assurer la guérison du comte s’il garde encore deux ou trois jours le lit. Et maintenant, adieu, madame ; les blessés de Lavaur m’attendent.
Montfort, voyant son sauveur se diriger vers la porte, se soulève à demi sur sa couche, et dit à Karvel d’un ton impératif : — Reste ! — (Le Parfait hésite à obéir au comte ; celui-ci frappe sur un timbre placé près de lui, et dit à l’un de ses écuyers qui est accouru :) — Ce médecin ne sortira pas d’ici sans mon ordre.
L’écuyer s’incline et quitte la chambre. Karvel reste calme. L’heure