— Foi d’archer ! Jeanne se tient déjà en selle comme un capitaine ! Ventre du pape ! est-elle belle et bien tournée !… Que ne suis-je de ses gens d’armes ! j’irais avec elle au bout du monde, rien que pour le plaisir de la regarder !
— De fait, moi, si j’étais soldat, j’aimerais mieux obéir à un ordre donné d’une douce voix par des lèvres mignonnes et vermeilles, qu’à un ordre donné par une voix rude, par une bouche lippue, hérissée de poils gras !
— Voyez-vous sire Jean de Novelpont avec son armure de fer qui chevauche à la droite de Jeanne ?
— On dirait qu’il veille sur elle comme sur sa fille…
— Il vient de rajuster quelque chose à la bride de la haquenée de la Pucelle.
— À sa gauche est le sire de Baudricourt… il l’accompagne sans doute pendant une partie du chemin.
— Voilà l’écuyer Bertrand de Poulangy portant la lance et l’écu de son maître.
— Jésus ! ils n’ont que quatre hommes armés avec eux ! en tout six personnes, pour escorter Jeanne d’ici en Touraine ! à travers tant de mauvais pays !
— Dieu veillera sur la sainte fille !
— Voyez donc… elle se retourne sur sa selle et fait de la main à quelqu’un du château comme un signe d’adieu…
— Maintenant elle porte son mouchoir à ses yeux…
— Elle vient sans doute d’adresser cet adieu à son oncle et à sa tante, les vieux Laxart ?
— Oui, les voici tous deux à la fenêtre basse de la grosse tour… les mains jointes et pleurant de voir leur nièce s’éloigner pour toujours peut-être ! La guerre est si chanceuse !
— Pauvre chère fille ! le cœur doit lui saigner… comme elle dit… s’en aller ainsi toute seule… loin des siens, batailler à la merci de Dieu !