Page:Taine - Les Philosophes classiques du XIXe siècle en France, 1868.djvu/214

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gumentations si sèches. Souvent, en devenant érudit, on cesse d’être homme. La philologie est un souterrain obscur, étroit, sans fond, où l’on rampe au lieu de marcher, si éloigné de l’air et de la lumière, qu’on y oublie l’air et la lumière, et qu’on finit par trouver belle et naturelle la clarté fumeuse de la triste lampe qu’on traîne accrochée après soi. Au bout de quelques années de séjour, on y déclare que le ciel est un rêve d’esprit creux. J’ai entendu des habitants de ces caves traiter de chimère l’histoire que font les philosophes et les artistes, et rejeter comme choses malsaines l’imagination passionnée de M. Michelet et les idées générales de M. Guizot : en effet, quand un mineur revient à la surface, l’air pur le suffoque et la vraie lumière l’éblouit. Au contraire, lorsque M. Cousin s’enfonce dans ces noires galeries, il songe au retour, et d’un élan, sans qu’on s’y attende, le voilà remonté dans la philosophie, dans la haute histoire, dans le grand style, dans le monde supérieur où il eût dû toujours vivre, et qui est le seul digne de sa science et de son talent. Vous sortez d’un commentaire docte et aride, ayant pour but d’établir, d’après Stobée, Diogène de Laërte et d’autres, le système probable de Xénophane, et, parmi des arguments de commentateur, vous tombez sur la phrase suivante :

La partie du système de Xénophane qui porte l’em-