Page:Thevet - La France antarctique - Gaffarel, 1878.djvu/212

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dieux : îusques à tant que ceste canaille les voyât deuenir malades, mourir, et estre subiets à semblables passions comme eux, ont commencé à les mespriser, et plus mal traiter que de coustume, comme ceux qui depuis sont allez par dela, Espagnols et Portugais, de maniere que si on les irrite, ils ne font difficulté de tuer un chrestien, et le manger, comme ils font leurs ennemis. Cânibales, peuples viuans de chair humaine. Mais cela se fait en certaîs lieux et specialement aux Cannibales, qui ne viuent d’autre chose : comme nous faisons icy de bœuf et de moutô. Aussi ont-ils laissé à les appeller Charaïbes, qui est à dire prophetes, ou demidieux, les appellans côme par mepris et opprobre, Mahire, qui estoit le nom d’un de leurs anciens prophetes, lequel ils detesterent et eurent en mespris. Quant à Toupan, ils l’estiment grand, ne s’arrestant en un lieu, ains allàt çà et là, et qu’il declare ses grands secrets à leurs prophetes. Voylà quàt à la religion de noz Barbares ce que oculairement i’en ay congnu et entendu, par le moyen d’un truchement François[1] qui auoit là demeuré dix ans, et entendoit parfaitement leur langue. de chair humaine.

    — Id. Lettera rarissima. Antonio de Solis. Histoire de la conquête du Mexique. — Prescott. Id. § VI.

  1. Ces interprètes normands furent en effet nos meilleurs intermédiaires entre les Brésiliens et nos compatriotes. C’étaient de hardis aventuriers, habitués à ne compter que sur eux-mêmes, aux prises avec des difficultés sans cesse renaissantes, et qui furent très-bien accueillis par les Brésiliens. Non seulement ils adoptèrent leurs usages nationaux et parlèrent leur langue, mais encore ou prétend qu’ils poussèrent l’oubli de leur origine