Page:Thevet - La France antarctique - Gaffarel, 1878.djvu/429

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l’eau de pluye, en ces endroits est corrompue[1] pour l’infection de l’air, dont elle vient, et de matière pareillement corrompue en l’air et ailleurs, dôt ceste pluye est engendrée : de manière que si on en laue les mains, il s’eleuera dessus quelques vessies et pustules. A ce propos ie sçay bien que les Philosophes tiennêt quelque eau de pluye n’estre saine, et mettent difference entre ces eaux, avec les raisons que ie n’allegueray pour le present, euitant prolixité. Or quelque vice qu’il y eust, si en falloit-il boire, fusse pour mourir. Ceste eau dauantage tombant sur du drap, laisse une tache, que à grande difficulté lon peut effacer. Ayant doncques incontinent passé la ligne, il fut question pour nostre conduite, commêcer à compter noz degrez, depuis là iusques en notre Europe, autant en faut-il faire, quand on va par delà, apres estre paruenu soubs ladicte ligne.

Dimension de uniuers. Il est certain, que les Anciens[2] mesuroyent la terre

  1. Gonneville, dans son voyage au Brésil en 1503, fut surpris par ces pluies « aussi estoient incommodez de pluyes puantes qui tachoient les habits : cheutes sur la chair, faisoient venir bibes, et estoient frequentes. » Cf. Léry. Ouv. cit. § iv : « La pluye qui tombe soubs et es enuiron de ceste ligne non seulement put et sent fort mal, mais aussi est si contagieuse que si elle tombe sur la chair, il s'y leue des pustules et grosses vessies. » Dans la première des lettres de Nicolas Barré, un des compagnons de Villegaignon, nous lisons encore : « Les vents estoient ioincts auec pluye tant puante, que ceulx lesquels estoient mouillez de ladicte pluye, souldain ils estoient couuerts de grosses pustules. »
  2. Revue de géographie. Avril 1877. Monin. La longueur du méridien d'après Eratosthène.