Page:Thevet - La France antarctique - Gaffarel, 1878.djvu/96

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roit faire si petit banquet mesme en notre maniere de viure accoustumée, que toutes les saulces ne soyent sucrées, et aucunesfois les viandes. Ce qu'a esté defendu aux Atheniens par leurs loix, comme chose qui effeminoit le peuple : ce que les Lacedemoniens ont suiuy par exemple. Il est vray, que les plus grands seigneurs de Turquie boyuent eaux sucrées, pour ce que le vin leur est defendu par leur loy. Quant au vin, qu'a inuenté ce grand Hippocrates medecin, il estoit seulement permis aux personnes malades et débilitées : mais ce iour d'huy il nous est preque autant commun, que le vin est rare en autre païs. Fertilité des Canaries. Nous auons dit cela en passant sur le propos de sucre, retournons à nostre principal subiect. De bleds, il y en a quâtité en ces isles aussi de tres bô vin,[1] meilleur que celuy de Candie, où se trouuent les maluaisies, comme nous declarerons aux isles de Madere. De chairs, suffisamment, comme cheures sauuages et domestiques, oyseaux[2] de toute espece, grande quantité d'oranges[3], citrons, grenades, et autres fruits, palmes, et grande quantité de bon miel. Arbrisseaux nômés papiers.Il y a aussi aux riues des fleuues, des arbris-

  1. La vigne croissait naturellement aux Canaries, puisqu'on en trouve des feuilles enfouies : mais il n'est pas douteux que le plant producteur du Malvoisie des Canaries y a été apporté par les Espagnols.
  2. Les oiseaux les plus répandus sont les fameux serins, qui, depuis, se sont si bien acclimatés en Europe.
  3. Les oranges croissent spontanément aux Canaries. Le botaniste Ferari a publié un traité spécial, sur les pommes d'or des Hespérides, qui, d'après lui, ne sont autres que les oranges des Canaries. Voir Bory De Saint-Vincent. P. 335-341.