Page:Variétés Tome II.djvu/241

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tienne à quelque clerc, cocher ou vallet d’estable4 ; et, après s’estre gaillardement resjoüies et donné du bon temps, elles se retireront avec cent escus ou quatre cens livres, mettront leur enfant en nourrice, et tiendront par après boutique ouverte à tout le monde. Telle est nostre volonté en dernier ressort, contre laquelle il n’y a point d’appel. Faict le jour et an que dessus, aussi matin que vous voudrez.

Vramy voire ! dit une grosse servante de la ruë Sainct-Honoré qui a desjà joué deux fois du mannequin à basse marche5, vous nous la baillez belle avec vostre ordonnance ! Croyez-vous que nous ayons attendu jusqu’icy ? De ma part, je veux bien qu’on sçache que je suis en un logis où veritablement je ne gaigne pas grand gaige ; mais en recompense je vais au marché. Depuis deux ans je me suis fait enfler le ventre deux fois par nos laquais, qui jouënt assez bien de la flutte, et si ay bien eu l’industrie de donner les enfans à nostre maistre. Il est vray que la maistresse n’en sçait rien, et que pour accoucher j’ay faict semblant d’aller en mon pays ; mais il n’est que d’enfourner quand la paste est levée.



4. V. la Conférance des servantes de Paris, dans notre tome 1er, p. 320.

5. Cette expression est aussi employée par Rabelais (liv. 2, ch. 21), et de manière à nous convaincre qu’il y est fait allusion, non pas, comme le pense Le Duchat, au mannequin mobile et pliant des peintres, mais à quelque instrument de musique dont se servoient les ménétriers, et qui, venu d’Italie, devoit son nom au manche (manico) dont il étoit muni.