Page:Verne - Le Beau Danube Jaune.djvu/7

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Lancelot décrit ainsi l’arrivée à Bude et à Pesth :

« à droite, Bude, l’ancienne ville turque (…) ; à notre gauche, un large quai bordé de maisons blanches à hautes arcades, à pilastres et à colonnes, qui supportent de grands entablements et des toits en terrasse, et forment une perspective sévère, interrompue seulement par les campaniles de deux ou trois églises qui se profilent hardiment en pleine lumière »…[1]

Chez Jules Verne, réduit à quelques touches, cela devient :

« à droite, est Buda, l’ancienne ville turque, et à gauche, Pest, la capitale hongroise. (…) S’il eût été moins absorbé par le spectacle enchanteur que présentait ces deux villes, leurs maisons à arcades, à terrasses, disposées en bordure des quais, les clochers des églises que le soleil à cinq heures du soir dorait de ses derniers feux ». (ch. x)

À l’arrivée à Belgrade, Lancelot voit

« la ville qui étalait en amphithéâtre adouci ses maisons à l’européenne que surmonte le clocher d’une église. Au sommet, (…), des jardins et une mosquée surmontée de deux minarets à pointe aigües. À gauche, le sol redescendait assez rapidement portant comme une seconde ville cachée par des arbres fruitiers au milieu desquels s’élançaient de grands cyprès isolés. »[2]

Quant à Ilia Krusch, il voit

« apparaître une cité disposée en amphithéâtre sur une colline, avec ses maisons à l’européenne, ses clochers auxquels le soleil mettait une aigrette de flamme, et les deux minarets d’une mosquée, qui ne jurait pas trop dans le voisinage des églises. Un peu sur la gauche, au milieu d’une corbeille d’arbres fruitiers d’où s’élançaient des cyprès de haute taille, il y avait apparence d’une seconde ville plus moderne »… (ch. XII)

Tous les détails géographiques du Beau Danube jaune se retrouvent donc dans le récit du Tour du Monde. Bien entendu, dans W. Storitz, pendant la descente du Danube, toutes les descriptions des rives proviennent de la même source. Les habitants de Pesth y portent le deuil du comte Téléki, qui donnera son nom au boulevard entourant la maison du docteur Roderich[3].

Sur la « Carte du bassin oriental du Danube » (reproduit en hors-texte), figure bel et bien la ville de Racz, sur les rives de la Theiss. D’ailleurs, dans le Beau Danube jaune, Jules Verne précise à plusieurs reprises qu’Ilia Krusch est natif de Racz Becse. Dans Storitz, Racz devient Ragz et se déplace sur le Danube, après Vukovar. Reste à expliquer pourquoi dans ses deux œuvres danubiennes, Jules Verne choisit de glorifier cette petite ville inconnue dont Lancelot ne parle pas.

En dehors de la carte du Danube, je reproduis en hors-texte quelques illustrations de Lancelot, non pour leurs qualités artistiques, mais pour donner l’ambiance du récit de voyage dont Jules Verne s’est inspiré.

Le thème de l’œuvre

Le Beau Danube jaune relate simplement un voyage sur le Danube, depuis pratiquement sa source jusqu’à son embouchure ; thème repris au

  1. Le Tour du Monde, 1re sem. 1865, p. 34.
  2. op. cit., p. 65.
  3. Dans le manuscrit de Storitz, l’écrivain hésite entre les deux anagrammes, Tékéli ou Téléki : Tékéli, souvenir d’E. Poë et Téléki, le célèbre comte hongrois. (voir Ch. Chelebourg, « Le blanc et le noir », BSJV no 77, pp. 22-30.)
7