et de très-divertissans. Les auteurs n’y mettaient pas leur nom, mais la plupart du temps on le devinait. Pour notre malheur à tous, et en particulier pour le mien, tous ces écrits étaient, je ne dirai pas en langue française, mais en mots français. Je fus assez heureux pour en jeter quelques-uns dans le tronc qui réjouirent beaucoup l’assemblée. C’étaient des facéties, mêlées de philosophie et d’impertinence, écrites dans un langage qui devait, pour le moins, être assez mauvais, s’il n’était pitoyable, mais qui s’entendaient et pouvaient passer devant un auditoire aussi peu versé que moi-même dans le français. Il y en eut une dans le nombre que je conserve encore. J’avais pris pour sujet le jugement dernier : Dieu demandait à toutes les âmes l’entière confession de leur vie, et j’avais mis en scène différens personnages qui venaient peindre leur propre caractère. Ce morceau eut beaucoup de succès, parce qu’il n’était dépourvu ni de sel, ni de vérité. Ces allusions et ces portraits animés, plaisans et variés, laissaient reconnaître une foule de mes compatriotes des deux sexes : tout l’auditoire y mettait aussitôt le nom.
Ce petit essai, qui me prouva que je pouvais jeter sur le papier quelques idées telles quelles, et en le faisant, causer quelque plaisir aux autres, ne laissa pas que de m’inspirer un désir confus, une espérance lointaine d’écrire un jour des choses qui auraient chance de vivre ; mais que serait-ce ? Je ne le savais pas, et les moyens me manquaient. D’abord, je ne me sentais de vocation que pour la