Page:Victor Alfieri, Mémoires, 1840.djvu/403

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faisaient retourner en Alsace avec délices. Mais une autre raison venait s’y joindre encore, qui devait doubler le plaisir que je ressentais. Mon ami Caluso m’avait fait espérer qu’il viendrait passer l’été avec nous en Alsace ; de tous les hommes que j’avais connus, c’était le meilleur, et depuis la mort de Gori, le dernier ami qui me restait. Quelques semaines après notre retour en Alsace, vers la fin de juillet, nous nous mîmes en route, mon amie et moi, pour aller au-devant de Caluso, et nous poussâmes jusqu’à Genève ; nous le ramenâmes, en traversant toute la Suisse, jusqu’à notre campagne près de Colmar, où se trouvait ainsi réuni tout ce que j’avais de plus cher au monde. Mon premier entretien avec mon ami roula, j’étais bien loin de m’y attendre, sur des affaires domestiques. Mon excellente mère l’avait chargé d’une commission fort étrange, si l’on pense à mon âge, à mes occupations et à ma manière de voir : c’était une proposition de mariage. Il me la fit en riant, et ce fut aussi en riant que j’y répondis par un refus, et nous nous entendîmes pour adresser à ma tendre mère une réponse qui nous excusât l’un et l’autre. Mais pour donner au lecteur une idée de l’affection et des manières simples de cette femme vénérable, je transcrirai ici la lettre qu’elle m’écrivit à ce sujet.

LETTRE DE LA MÈRE DE l’AUTEUR.

Mon très-cher et bien-aimé fils, J’ai écrit le 8 courant à M. l’abbé de Caluso, pour le prier