Page:Victor Alfieri, Mémoires, 1840.djvu/434

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L’événement accompli, je ne voulus pas perdre un seul jour, et ma première, mon unique pensée étant de soustraire mon amie à tous les dangers qui pouvaient la menacer, je me hâtai, dès le 18, de faire tous les préparatifs de notre départ. Restait la plus grande difficulté ; il nous fallait des passeports pour sortir de Paris et du royaume ; nous

peler du courage dans un martyr, mais non dans un homme, qui doit mourir plutôt que de se laisser avilir. Comme d’heure en heure il s’attendait à être attaqué, il reçut un message de cette perfide assemblée et de cette municipalité de Paris, plus perfide encore, qui en lui annonçant que dans un pareil tumulte on ne pouvait répondre de sa personne, l’invitaient, lui et la famille royale, à se réfugier, par le jardin des Tuileries, au sein de l’assemblée qui y est attenante, puisque la communication du château à l’assemblée par le jardin était encore libre. Le roi, qui avait fait mine de vouloir se laisser défendre, surtout par ses gentilshommes qui veillaient a l’intérieur, changeant tout-à-coup de résolution, accepta l’invitation qui lui était faite, et se rendit immédiatement avec toute sa famille et un très-petit nombre de courtisans, au milieu de l’assemblée. Nous viendrons bientôt l’y retrouver; retournons au château. Ces Suisses vraiment fidèles, ces gardes nationales, celles-là ébranlées, celles-ci hostiles, et toutes lâches, ces trois cents pauvres gentilshommes prêts à mourir aux pieds du roi dans l’intérieur, tous étaient restés renfermés comme dans une cage, les uns dans les cours intérieures, les autres dans les appartemens, car le roi était à peine sorti avec une escorte de gardes nationaux que l’on referma toutes les grilles qui mènent du palais au jardin. Ici, il est difficile de savoir si ce fut l’armée des assaillans qui tira la première, ou si ce furent les Suisses. Il est vraisem-