Page:Victor Alfieri, Mémoires, 1840.djvu/514

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pour cette œuvre, avez choisi cette main souveraine, afin que par vous fussent dignement honorés les restes de celui qui vous rapporta tout entier l’honneur de ses écrits ; et cependant vous pleurez comme si vous aviez trop peu fait encore pour votre gloire.


III.


» Là, dans l’âge futur, viendront en pieux pèlerins les plus nobles amans ; car les siècles craindront d’ensevelir dans l’ombre autant que les tragiques scènes d’Alfieri, ces chants plus humbles,

» Dans lesquels le monde apprendra, madame, vos rares qualités et les aventures de ce généreux amour, par où autrefois vous viviez dans une double vie, par où désormais ce n’est plus votre vie, c’est votre douleur qui se continue, et lui reste fidèle.

» Et quelqu’un dira : Laquelle entre les plus célèbres peut, à l’égal de celle-ci, marcher fière de l’amant passionné, du poète illustre, du poète sublime, qui lui consacra son génie ?

» Et quel esclave de l’amour posséda, espéra jamais un objet, non seulement plus accompli, mais doué d’un mérite plus éclatant et plus vrai ? »


Je pourrais dire plus encore pour montrer quel homme ce fut, et quelle perte nous avons faite, ainsi que l’Italie. Mais le respect et la pitié me commandent de retenir mes larmes, de peur d’en faire couler de plus douloureuses ; mieux vaut encore, madame, que je sèche les vôtres, en vous rappelant que, dans ses écrits immortels, son génie du moins