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CORBEILLE, s. f. Forme génératrice du chapiteau autour de laquelle se groupent les ornements, feuillages ou figures qui le décorent. La corbeille repose, à sa partie inférieure, sur l’astragale, et est surmontée du tailloir ou abaque (voy. Chapiteau).

CORDON, s. m. Moulure composée d’un seul membre, qui règne horizontalement sur un mur vertical. Le cordon n’a pas l’importance du bandeau, qui indique toujours une arase de la construction, comme un plancher, par exemple, un étage. Le cordon est un membre intermédiaire dont la place n’est indiquée que par le goût, afin de détruire la nudité de parties verticales trop hautes. On ne trouve de cordons que dans l’architecture romane, car, dans l’architecture gothique, toutes les assises horizontales formant saillie ont toujours une signification réelle et indiquent un sol, une arase.

CORNICHE, s. f, Entablement. Couronnement d’une construction en pierre ou en bois et destiné à recevoir la base du comble. La corniche est un des membres de l’architecture du moyen âge qui indique le mieux combien les principes de cette architecture diffèrent de ceux admis par les Romains.

Dans l’architecture romaine, la corniche appartient à l’entablement, qui lui-même appartient à l’ordre, de sorte que si les Romains superposent plusieurs ordres dans la hauteur d’un monument, ils ont autant de corniches que d’ordres. Ainsi un édifice composé de plusieurs ordres superposés n’est qu’un échafaudage d’édifices placés les uns sur les autres. Bien mieux, si le Romain place un ordre à l’intérieur d’une salle, il lui laisse sa corniche, c’est-à-dire son couronnement destiné à recevoir le comble. Cela peut produire un grand effet, mais ne saurait satisfaire la raison. D’ailleurs, dans les ordres romains, qui sont dérivés des ordres grecs, la corniche, par la forme de ses moulures, sa saillie et les appendices dont elle est accompagnée, indique clairement la présence d’un chéneau, c’est-à-dire la base d’un comble et le canal longitudinal recevant les eaux de pluie coulant sur la surface de ce comble. Or, à quoi bon un chéneau à mi-hauteur d’un mur et surtout à l’intérieur d’une salle voûtée ou lambrissée ? Donc, pourquoi une corniche ? Nous avons dit ailleurs combien le Romain était peu disposé à raisonner l’enveloppe, la décoration de ses édifices[1]. Nous ne leur en faisons pas un reproche, seulement nous constatons ce fait : que, dès l’époque romane, les architectes, si grossiers qu’ils fussent, partaient de principes très-opposés à ceux des Romains, ne se servant des divers membres de l’architecture qu’en raison de leur fonction réelle, dépendante de la structure. Où avaient-ils pris ces principes ? Était-ce dans leur propre sentiment, par leur seule faculté de raisonner ? Était-ce dans les traditions byzantines ? C’est ce que nous

  1. Voy. les Entretiens sur l’Architecture.