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CHAPITRE CXXII.

-Quint, cultiva les arts plus que jamais. Les guerres de religion étalaient ailleurs des ruines ; mais, à Rome et dans plusieurs autres villes italiennes, l’architecture était signalée par des prodiges. Dix papes de suite contribuèrent presque sans interruption à l’achèvement de la basilique de Saint-Pierre, et encouragèrent les autres arts : on ne voyait rien de semblable dans le reste de l’Europe. Enfin la gloire du génie appartint alors à la seule Italie, ainsi qu’elle avait été le partage de la Grèce.

Une centaine d’artistes en tout genre a formé ce beau siècle que les Italiens appellent le Seicento[1]. Plusieurs de ces grands hommes ont été malheureux et persécutés ; la postérité les venge : leur siècle, comme tous les autres, produisit des crimes et des calamités ; mais il a sur les autres siècles la supériorité que ces rares génies lui ont donnée. C’est ce qui arriva dans l’âge qui produisit les Sophocle et les Démosthène, dans celui qui fit naître les Cicéron et les Virgile. Ces hommes, qui sont les précepteurs de tous les temps, n’ont pas empêché qu’Alexandre n’ait tué Clitus, et qu’Auguste n’ait signé les proscriptions. Racine, Corneille, et La Fontaine, n’ont certainement pu empêcher que Louis XIV n’ait commis de très-grandes fautes. Les crimes et les malheurs ont été de tous les temps, et il n’y a que quatre siècles pour les beaux-arts. Il faut être fou pour dire que ces arts ont nui aux mœurs ; ils sont nés malgré la méchanceté des hommes, et ils ont adouci jusqu’aux mœurs des tyrans.

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CHAPITRE CXXII.


De Charles-Quint et de François Ier jusqu’à l’élection de Charles à l’empire, en 1519. Du projet de l’empereur Maximilien de se faire pape. De la bataille de Marignan.


Vers ce siècle où Charles-Quint eut l’empire, les papes ne pouvaient plus en disposer comme autrefois ; et les empereurs avaient

  1. Ginguené fait observer qu’ici Voltaire se trompe. Les Italiens appellent Seicento le siècle pendant lequel on compte six cents après mille, c’est-à-dire le XVIIe siècle (de 1601 à 1700). Le siècle auquel appartiennent les années du règne de Léon X est appelé par les Italiens Cinquecento (de 1501 à 1600), et non Seicento. (B.)