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ARNOUD.

n’abandonnèrent point la ville comme autrefois. Le comte de Paris, Odon ou Eudes, que sa valeur éleva depuis sur le trône de France, mit dans la ville un ordre qui anima les courages, et qui leur tint lieu de tours et de remparts. Sigefroi, chef des Normands, pressa le siége avec une fureur opiniâtre, mais non destituée d’art. Les Normands se servirent du bélier pour battre les murs. Ils firent brèche, et donnèrent trois assauts. Les Parisiens les soutinrent avec un courage inébranlable. Ils avaient à leur tête le comte Eudes, et leur évêque Goslin, qui fit à la fois les fonctions de prêtre et de guerrier dans cette petite ville : il bénissait le peuple, et combattait avec lui ; il mourut de ses fatigues au milieu du siége : le véritable martyr est celui qui meurt pour sa patrie.

Les Normands tinrent la petite ville de Paris bloquée un an et demi, après quoi ils allèrent piller la Bourgogne et les frontières de l’Allemagne, tandis que Charles le Gros assemblait des diètes.

887. Il ne manquait à Charles le Gros que d’être malheureux dans sa maison : méprisé dans l’empire, il passa pour l’être de sa femme l’impératrice Richarde. Elle fut accusée d’infidélité. Il la répudia, quoiqu’elle offrît de se justifier par le jugement de Dieu. Il l’envoya dans l’abbaye d’Andlaw, qu’elle avait fondée en Alsace.

On fit ensuite adopter à Charles, pour son fils (ce qui était alors absolument hors d’usage), le fils de Boson, ce roi d’Arles, son ennemi. On dit qu’alors son cerveau était affaibli. Il l’était sans doute, puisque, possédant autant d’États que Charlemagne, il se mit au point de tout perdre sans résistance. Il est détrôné dans une diète auprès de Mayence.



ARNOUD,
huitième empereur[1].

888. La déposition de Charles le Gros est un spectacle qui mérite une grande attention. Fut-il déposé par ceux qui l’avaient élu ? quelques seigneurs thuringiens, saxons, bavarois, pouvaient-

  1. Dans toutes les éditions données jusqu’à ce jour, ce n’est qu’en tête de l’année 896 qu’on trouve le nom d’Arnoud. (B.) — Il est question d’Arnoud dans l’Essai sur les Mœurs : voyez tome XI, pages 304, 332-333.