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SUPPLÉMENT AU SIÈCLE DE LOUIS XIV.

devoir indispensable. On a rempli ce devoir à l’égard du cardinal Mazarin, dans la nouvelle édition. Voici comment on s’exprime sur ce ministre :

« Le grand homme d’État est celui dont il reste de grands monuments utiles à la patrie[1]. Le monument qui immortalise le cardinal Mazarin est l’acquisition de l’Alsace. Il donna cette province à la France dans le temps que le royaume était déchaîné contre lui : et par une fatalité singulière, il lui fit plus de bien lorsqu’il était persécuté que dans la tranquillité d’une puissance absolue. »

On prie le lecteur de jeter les yeux sur tout ce qui concerne la paix de Rysvick, dans cette nouvelle édition[2], la seule qu’on puisse consulter : c’est un morceau très-utile, tiré des Mémoires manuscrits de M. de Torcy. Ces mémoires démentent formellement ce que tant d’historiens, tant d’hommes d’État, et milord Bolingbroke lui-même, avaient cru, que le ministère de Versailles avait dès lors dévoré en idée la succession du royaume d’Espagne ; et rien ne répand plus de jour sur les affaires du temps, sur la politique et sur l’esprit du conseil de Louis XIV.

On voit quels services rendit le maréchal d’Harcourt dans la grande crise de l’Espagne, lorsque l’Europe en alarmes attendait d’un mot de Charles II mourant quel serait le successeur de tant d’États. De nouvelles anecdotes sont ainsi semées dans tous les chapitres.

On en trouve au second volume[3] sur l’homme au masque de fer ; mais les morceaux les plus curieux, sans contredit, et les plus dignes de la postérité, sont deux mémoires de la propre main de Louis XIV. Le chapitre du Gouvernement intérieur est très-augmenté ; c’est là qu’on voit d’un coup d’œil ce qu’était la France avant Louis XIV, ce qu’elle a été par lui, et depuis lui. Les matériaux seuls de ce chapitre font connaître la nation et le monarque. Il n’y a nul mérite à les avoir mis en œuvre ; mais c’est un grand bonheur d’avoir pu les recueillir.

Le dernier chapitre[4] contient cinquante-six articles nouveaux,

  1. Voyez la note 1, tome XIV, page 225.
  2. L’édition dont Voltaire parle ici est celle qui fut publiée à Dresde, chez G.-C. VValther, 1753, deux volumes petit in-8o.
  3. Voyez tome XIV, page 427.
  4. Dans les éditions du Siècle de Louis XIV, antérieures à 1768, c’était à la fin de l’ouvrage qu’était placé le Catalogue de la plupart des écrivains, etc., qu’on a vu tome XIV, page 32. Depuis 1753, année où Voltaire publia le Supplément, il a fait d’autres augmentations au Catalogue. J’en ai désigné quelques-unes. (B.)