dans le Piémont et dans son duché de Savoie, où les vicissitudes de la guerre demandaient sa présence. L’infant don Philippe avait en vain tenté de débarquer à Gênes avec de nouvelles troupes. Les escadres d’Angleterre l’en avaient empêché ; mais il avait pénétré par terre dans le duché de Savoie, et s’en était rendu maître. C’est un pays presque ouvert du côté du Dauphiné. Il est stérile et pauvre. Ses souverains en retiraient alors à peine quinze cent mille livres de revenu. Charles-Emmanuel, roi de Sardaigne et duc de Savoie, l’abandonna pour aller défendre le Piémont, pays plus important.
On voit par cet exposé que tout était en alarmes, et que toutes les provinces éprouvaient des revers du fond de la Silésie au fond de l’Italie. L’Autriche n’était alors en guerre ouverte qu’avec la Bavière, et cependant on désolait l’Italie. Les peuples du Milanais, du Mantouan, de Parme, de Modène, de Guastalla, regardaient avec une tristesse impuissante toutes ces irruptions et toutes ces secousses, accoutumés depuis longtemps à être le prix du vainqueur, sans oser seulement donner leur exclusion et leur suffrage.
La cour d’Espagne fit demander aux Suisses le passage par leur territoire, pour porter de nouvelles troupes en Italie ; elle fut refusée. La Suisse vend des soldats à tous les princes, et défend son pays contre eux. Le gouvernement y est pacifique, et les peuples guerriers. Une telle neutralité fut respectée. Venise, de son côté, leva vingt mille hommes pour donner du poids à la sienne.
Il y avait dans Toulon une flotte de seize vaisseaux espagnols, destinée d’abord pour transporter don Philippe en Italie ; mais il avait passé par terre, comme on a vu. Elle devait apporter des provisions à ses troupes, et ne le pouvait, retenue continuellement dans le port par une flotte anglaise qui dominait dans la Méditerranée, et insultait toutes les côtes de l’Italie et de la Provence. Les canonniers espagnols n’étaient pas experts dans leur art : on les exerça dans le port de Toulon pendant quatre mois, en les faisant tirer au blanc, et en excitant leur émulation et leur industrie par des prix proposés.
(22 février 1744) Quand ils se furent rendus habiles, on fit sortir de la rade de Toulon l’escadre espagnole, commandée par don Joseph Navarro. Elle n’était que de douze vaisseaux, les Espagnols n’ayant pas assez de matelots et de canonniers pour en manœuvrer seize. Elle fut jointe aussitôt par quatorze vaisseaux français, quatre frégates, et trois brûlots, sous les ordres de