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CHAPITRE LXIX.



CHAPITRE LXIX.[1]

LE PARLEMENT MÉCONTENTE LE ROI ET UNE PARTIE DE LA NATION. SON ARRÊT CONTRE LE CHEVALIER DE LA BARRE ET CONTRE LE GÉNÉRAL LALLY.

Qui pouvait croire alors que dans peu de temps le parlement éprouverait le même sort que les jésuites ? Il fatiguait depuis plusieurs années la patience du roi, et il ne se concilia pas la bienveillance du public par le supplice du chevalier de La Barre et par celui du général Lally[2].

Ce corps déplaisait bien plus au gouvernement par sa lutte perpétuelle contre les édits du roi que par ses cruautés envers quelques citoyens. Il semblait prendre à la vérité le parti du peuple, mais il gênait l’administration, et il paraissait toujours vouloir établir son autorité sur la ruine de la puissance suprême.

Il s’unissait en effet avec les autres parlements, et prétendait

  1. Ce chapitre, tel qu’il est, à quelques mots près, parut, en 1775, dans l’édition encadrée. (B.)
  2. Dans l’édition de 1777, in-4°, après cet alinéa, il y avait :

    « On ne peut mieux faire, pour l’instruction du genre humain, que de rapporter ici la lettre d’un vertueux avocat du conseil à M. de Beccaria, le plus célèbre jurisconsulte d’Italie. »

    Puis venait une réimpression de la Relation de la mort du chevalier de La Barre ; voyez les Mélanges, année 1766. Après cette Relation, le chapitre LXIX était terminé par les deux alinéas que voici :

    « Le second acte de cruauté qu’une grande partie du public reprocha au parlement de Paris fut le supplice du comte de Lally, général des armées du roi dans les Indes occidentales, traîné dans un tombereau dans la Grève, avec un bâillon dans la bouche, le 6 mai 1766.

    « Les cris de ses ennemis, soulevés contre lui par son humeur dure et insociable, furent si violents et si persévérants que les juges le condamnèrent d’une voix unanime. Mais la pitié qui succéda à ce déchaînement fut si forte que le même public, toujours léger, qui semblait avoir d’abord demandé son sang, fut enfin persuadé de son innocence. En effet, on n’avait pu trouver ni trahison, ni rapine de sa part ; et quand il fallut chercher dans sa fortune de quoi fournir l’amende à laquelle il fut condamné, on ne la trouva pas ; alors on éclata contre les juges. »

    C’est sans doute parce que le chapitre eût été trop long qu’en 1777 il y avait un chapitre LXX, commençant par ces mots : « Le parlement déplaisait, etc. »

    Sur le procès de Lally, voyez, tome XV, le chapitre XXXIV du Précis du Siècle de Louis XV, et dans les Mélanges, année 1773, les chapitres XVIII et XIX des Fragments sur l’Inde. (B.)