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ET SUR SA PROPAGATION.

SECTION V.
n’est-il pas la cause de l’électricité ?

S’il est vraisemblable que le feu est la cause de l’élasticité, il ne l’est pas moins que l’électricité soit aussi un de ses effets.

La marche de l’esprit humain doit être, ce me semble, de se contenter d’attribuer les mêmes effets aux mêmes causes, jusqu’à ce que l’expérience découvre une cause nouvelle. Or l’électricité paraît toujours produite par la cause qui produit toujours du feu dans les corps durs, c’est-à-dire qui développe le feu que ces corps durs contiennent ; cette cause est le frottement, l’attrition des parties. Il n’y a aucun corps dur frotté qui ne s’échauffe ; il n’y a aucun corps électrique qui ne doive être chauffé avant d’exercer cette électricité.

Quelques corps durs frottés s’enflamment ; quelques corps électriques jettent des étincelles brûlantes ; tous, après un long et violent frottement, jettent de la lumière.

Il est vrai que les métaux, quelque attrition qu’ils puissent éprouver, n’attirent point les corps minces à eux, n’exercent point d’électricité ; mais on ne dit point que tout ce qui prend feu soit électrique : on remarque seulement que tout ce qui devient électrique jette du feu plus ou moins ; donc le feu paraît avoir très-grande part à cette électricité. Au moins il est indubitable qu’il n’y a point d’électricité sans mouvement, et qu’il n’y a point dans la nature de mouvement sans le feu[1].

  1. Lorsqu’on approche doux corps dans lesquels l’électricité n’est pas en équilibre, il arrive qu’à l’instant où l’équilibre se rétablit, soit lentement, soit dans un seul instant, il se manifeste du feu ; ce feu est visible dans l’air et dans le vide, produit de la chaleur, allume les corps inflammables, fond les métaux. Ce feu paraît moins simple que celui des rayons de lumière rassemblés au foyer d’un miroir : il a une odeur propre, et d’ailleurs il produit sur les corps qu’il traverse des effets chimiques que les rayons du miroir ardent ne paraissent point produire. On peut observer que, comme les corps changent de température sensible en passant de l’état solide à celui de liquide, de l’état de liquide à celui de vapeurs, de même ce changement influe sur leur état relativement à l’électricité. Le plus ou le moins de chaleur agit aussi sur l’électricité ; la glace devient électrique par frottement comme le verre, à un certain degré de froid ; le verre devient électrique par communication comme les métaux, à un certain degré de chaleur.
    On ne savait presque rien sur l’électricité en 1738. (K.)
    — Les conclusions de la section v sont problématiques, au moins dans la forme. (D.)