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L’A, B, C.

sécuteurs, que j’ignore absolument tous les premiers principes des choses.

B.

Vous êtes un grand ignorant, et nous aussi.

A.

D’accord.

B.

Pourquoi donc raisonnons-nous? Comment saurons-nous ce qui est j.uste ou injuste, si nous ne savons pas seulement ce que c’est qu’une âme ?

A.

Il y a bien de la différence : nous ne connaissons rien du principe de la pensée, mais nous connaissons très-bien notre in- térêt. Il nous est sensible que notre intérêt est que nous soyons justes envers les autres, et que les autres le soient envers nous, afin que tous puissent être sur ce tas de boue le moins malheu- reux que faire se pourra pendant le peu de temps qui nous est donné par l’Être des êtres pour végéter, sentir et penser.



TROISIÈME ENTRETIEN.
SI L’HOMME EST NÉ MÉCHANT ET ENFANT DU DIABLE.


B.

Vous êtes Anglais, monsieur A; vous nous direz bien franche- ment votre opinion sur le juste et l’injuste, sur le gouvernement, sur la religion, la guerre, la paix, les lois, etc., etc., etc., etc.

A.

De tout mon cœur; ce que je trouve de plus juste, c’est liberté e\ propriété. Je suis fort aise de contribuera donner à mon roi un million sterling par an pour sa maison, pourvu que je jouisse de mon bien dans la mienne. Je veux que chacun ait sa prérogative : je ne connais de lois que celles qui me protègent, et je trouve notre gouvernement le meilleur de la terre, parce que chacun y sait ce qu’il a, ce qu’il doit, et ce qu’il peut. Tout est soumis à la loi, à commencer par la royauté et par la religion.

C. Vous n’admettez donc pas le droit divin dans la société?