Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome27.djvu/521

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voir quarante moins un coup[1] ; mais s’il a blasphémé contre le Seigneur, d’être alors lapidé. Pilate leur dit : Si ce discours est un blasphème, jugez-le vous-mêmes selon votre loi. Les Juifs disent à Pilate : Notre loi nous ordonne[2] de ne tuer personne. Nous voulons qu’il soit crucifié, parce qu’il est digne de la croix. Pilate leur dit : Il n’est pas bon qu’il soit crucifié ; mais châtiez-le[3], et le renvoyez. Or le gouverneur, regardant le peuple des Juifs qui l’environnait, vit plusieurs Juifs qui pleuraient, et il dit aux princes des prêtres des Juifs : Toute la multitude ne désire pas qu’il meure. Les vieillards des Juifs disent à Pilate : Nous ne sommes venus ici, nous et toute la multitude, qu’afin qu’il meure. Pilate leur dit : Pourquoi mourra-t-il ? Ils lui disent : Parce qu’il se dit être fils de Dieu et roi.

V. — Or un certain Nicodème, homme juif, se présenta devant le gouverneur, et dit : Je vous prie, juge miséricordieux, que vous daigniez m’entendre un instant. Pilate lui dit : Parlez. Nicodème dit : C’est moi qui ai dit aux vieillards des Juifs, et aux scribes, et aux prêtres, et aux lévites, et à toute la multitude des Juifs dans la synagogue : Que cherchez-vous avec cet homme ? Cet homme fait plusieurs prodiges bons et glorieux, tels qu’aucun homme sur la terre n’en a fait ou n’en fera ; renvoyez-le, et ne lui faites aucun mal. S’il est de Dieu[4], ses prodiges subsisteront ; mais s’il est des hommes, ils seront dissipés. De même que quand Moïse, envoyé de Dieu en Égypte, fit des prodiges que Dieu lui dit de faire devant Pharaon, roi d’Égypte, il y avait Jannès et Mambrès[5], magiciens, et ils firent, par leurs enchantements, les prodiges qu’avait faits Moïse, mais non pas tous ; et les prodiges que firent les magiciens n’étaient pas de Dieu, comme vous savez, vous scribes et pharisiens : ils périrent eux qui les firent, et tous ceux qui les crurent[6] ; et maintenant renvoyez cet homme, parce que les prodiges dont vous l’accusez sont de Dieu, et il n’est pas digne de mort. Les Juifs disent à Nicodème : Vous êtes devenu son disciple, et vous parlez pour lui. Nicodème leur dit : Est-ce que le gouverneur est aussi devenu son disciple, et qu’il parle pour lui ? Est-ce qu’il ne tient pas sa dignité de César ? Or les Juifs frémissaient lorsqu’ils entendirent ces paroles, et grinçaient des dents contre Nicodème, et lui disaient : Recevez de lui la vérité,

  1. II, Corinth., xi, v. 24. (Note de Voltaire.)
  2. Exod., xx, v. 13. (Id.)
  3. Luc, xxiii, v. 16. (Id.)
  4. Act., v, v. 38. (Note de Voltaire.)
  5. II, Tim., iii, v. 8, on lit Jambrès. (Id.)
  6. Act., v, v. 37. (Id.)