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pour le marquis d’Argence, en son château de Dirac, près d’Angoulême : je prie mon frère de m’en donner des nouvelles. Je répète que le Despotisme oriental pourrait bien avoir été pincé, pour avoir été indiscrètement envoyé en forme de livre.

La Mort de Socrate[1] est un beau sujet dans une république où l’on peut mettre sur le théâtre l’injustice, l’ignorance, la sottise, et la cruauté des juges. Je souhaite que ce sujet réussisse en France.

Voulez-vous des Meslier et autres drogues ? j’en pourrai découvrir dans les greniers du pays.


4940. — À M. DEBRUS[2].

M. de Court[3] n’a certainement écrit qu’avec les meilleures intentions du monde. Je crois qu’on aurait tort de l’affliger et de le décourager. Il aurait encore plus de tort de faire publier son livre en France, avant que le parlement de Toulouse ait envoyé ses procédures et ses motifs ; mais, après cet envoi, je ne pense pas qu’il y ait le moindre risque. Il faudrait le consoler par un petit présent pour le dédommager du retardement et des cartons que l’on demande ; je suis prêt d’y contribuer. M. Debrus peut voir avec ses amis à peu près ce qu’il faudra. Soyons bien tranquilles. Ayez grand soin de votre santé, monsieur ; je vous renvoie la lettre de M. Dumas[4], qui m’a fait un extrême plaisir, et

  1. La tragédie de Sauvigny qui porte ce titre ne fut représentée que le 7 mai 1763.
  2. Éditeur, A. Coquerel.
  3. Il s’agit des Lettres toulousaines de Court de Gébelin.

    Cet écrivain était fils du pasteur Antoine Court, de l’homme qui, au péril de sa vie, réorganisa les Églises réformées de France sous le régne de Louis XV. Le séminaire qu’il fonda et qu’il dirigea à Lausanne l’obligea à vivre dans cette ville. Court de Gébelin habita Paris, et succéda à son père dans le poste obscur et difficile d’agent officieux des Églises réformées auprès des autorités. Il était fort instruit et zélé, mais il manqua, soit dans ses grands travaux sur les langues et le Monde primitif, soit dans ses Lettres toulousaines, de méthode et de tact. Il eut le bon esprit de se soumettre aux conseils de Voltaire en retardant la mise en vente des Lettres toulousaines, et en corrigeant dans ce livre quelques pages trop violentes au moyen de cartons. On voit que Voltaire eut pour lui des ménagements et des égards bienveillants. Il les méritait.

    Les Lettres toulousaines ont paru, en effet, avec des suppressions et des cartons ; on en trouve des exemplaires qui n’ont que 444 pages ; ceux qui sont complets en ont 458. Cet ouvrage parut à Lausanne, avec la fausse indication d’Edimbourg, en 1763. (Note du premier éditeur.)

  4. M. Dumas fut l’hôte de Mme Calas, quand elle alla s’établir à Paris ; il se montra pour elle plein de zèle et de dévouement. (Id.)