Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome42.djvu/209

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chancelier ; qu’on ne lui donne ni repos ni trêve ; qu’on lui crie toujours : Calas ! Calas !

Ma quatrième inquiétude vient de la famille d’Alexandre[1]. Je l’ai envoyée à l’électeur palatin, en lui disant qu’il ne fallait point la faire jouer, et sur-le-champ il a distribué les rôles. Je vais lui écrire pour le prier de ne la point imprimer, et il l’imprimera. Je crois que, pour me dépiquer, je serai obligé d’en faire autant. Je suis presque aussi content de Cassandre qu’un palatin ; mais il se pourrait faire que mon extrême dévotion dans cet ouvrage, ma confession, ma communion, ma Statira mourant de mort subite, mon bûcher, etc., donnassent quelque prise à mes bons amis les Fréron et consorts. J’ai écrit la pièce de mon mieux ; mais je crois qu’il faut accoutumer le public, par la voie de l’impression, à toutes ces singularités théâtrales : c’est, à mon sens, le meilleur parti, d’autant plus qu’étant dans le goût des commentaires, j’en ai fait un sur cette pièce qui est extrêmement profond et merveilleux. M. Joly de Fleury pourrait en être tout ébouriffé.

Je vous enverrai Hérode et Mariamne incessamment ; vous y verrez une espèce de janséniste[2], essénien de son métier, que j’ai substitué à Varus, comme je crois vous l’avoir déjà dit. Ce Varus m’avait paru prodigieusement fade. Je baise toujours du meilleur de mon cœur le bout de vos ailes, et présente mes respects et remerciements à Mme d’Argental.


4995. — À M. DEBRUS[3].

Je bénis, monsieur, le maître de la vie et de la mort qui vous rend votre santé ; je m’y intéresse tendrement, et j’espère bientôt venir vous le dire.

Je suis fort de votre avis que Mme Calas aille trouver M. Quesnay[4], mais je ne sais si elle se doit trouver sur le passage du

  1. La tragédie d’Olympie. Dans la Correspondance de Grimm, à la date du 15 août 1762, on parle d’une lettre de Voltaire à d’Argental, de la semaine dernière, dans laquelle était cette phrase : « N’espérez pas tirer de moi une tragédie, que celle de Toulouse ne soit finie. » Il paraîtrait qu’il y a de perdu une lettre à d’Argental. Mais il est à remarquer que, dans sa lettre au marquis de Chauvelin, n° 5005, Voltaire dit le contraire de ce que lui fait dire Grimm.
  2. Sohême ; voyez tome II, pages 162, 174, 227.
  3. Éditeur, A. Coquerel.
  4. Quesnay, le physiocrate, premier médecin de Louis XV et médecin de Mme de Pompadour, était fort écouté de l’un et de l’autre.