Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome44.djvu/136

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parlé une fois[1] d’un M. Fabry, syndic des petits états de mon pays de Gex, maire de la ville de Gex, qui a été longtemps employé au règlement des limites avec la Suisse et Genève ; il est chargé des affaires en attendant l’arrivée de M. Hennin. Il m’a paru n’être pas mécontent des moyens de pacification que j’ai imaginés, et de ceux que j’ai ajoutés depuis ; il m’a paru désirer de travailler sur ces principes, et de préparer l’ouvrage que M. Hennin doit consommer ; il a cru que ce service lui mériterait les récompenses qu’il attend d’ailleurs de M. le duc de Praslin.

J’ai pensé, mes divins anges, que je devais lui faire le sacrifice de cette petite négociation, sans pourtant abandonner le rôle que je joue, et ce rôle est de jeter de l’eau sur les charbons ardents allumés par Jean-Jacques ; cela me suffit, je n’en veux pas davantage. Je me flatte que M. le duc de Praslin agréera ma conduite, et que M. Hennin n’en sera pas mécontent.

Si vous voyez monsieur le coadjuteur, je vous supplie de lui dire que je suis aussi fâché que lui du train qu’on pris les choses. On a, ce me semble, trop fatigué le roi et le ministère par des expressions pleines d’aigreur. On a hasardé de perdre jusqu’aux libertés de l’Église gallicane, dont tous les parlements ont toujours été si justement et si invariablement les défenseurs. Cela fait de la peine à un pauvre historien qui aime sa patrie, et qui est entièrement de l’avis de l’archevêque de Novogorod-la-Grande[2]. La raison commençait à pénétrer chez les hommes, le fanatisme ecclésiastique peut l’écraser. J’en gémis jusqu’au fond de mon cœur ; mais je compte toujours sur la sagesse du roi et de ses ministres, qui empêcheront que ces étincelles ne deviennent un embrasement.

Pardonnez à la bavarderie du vieux Suisse, qui aura toute sa vie pour vous la tendresse la plus respectueuse.


6170. — À MADAME LA VEUVE DUCHÈNE[3].
Au château de Ferney, par Genève, 30 novembre 1765.

M. de Voltaire ayant lu la Iragédie intitulée Adélaïde du Guesclin, que Mme Duchêne a imprimée, la prie très-instamment d’ajouter à la pièce la feuille qu’il lui envoie. Il est de l’intérêt


  1. Dans la lettre du 4 septembre, n° 6105.
  2. Voyez le Mandement, tome XXV, page 345.
  3. Éditeurs, Bavoux et François.