de pouvoir contribuer au bien de l’État par des voies pleines d’humanité. Je gagne d’un côté, et je perds de l’autre. Mes occupations, peut-être trop étendues, prennent tout mon temps et ne me laissent pas de vide pour me remplir de vos ouvrages, qui feraient le comble du bonheur de ma vie. Je n’aurai le temps de lire que lorsque je n’aurai plus d’yeux. Je me trouverai au bout de ma carrière fort ignorant, et je n’aurai pas, comme vous, monsieur, la consolation de pouvoir espérer de vivre après ma mort. J’ai l’honneur d’être, etc.
Mon cher ami, je vous parlerai de Henri IV avant de vous entretenir de Mlle Durancy.
1° Je savais qu’on avait défendu de faire jamais paraître Henri IV sur le théâtre, ne nomen ejus vilesceret ; et, en cas que jamais les comédiens voulussent jouer Charlot[1], il ne fallait pas les priver de cette petite ressource, supposé que c’en soit une dans leur décadence et dans leur misère ;
2° Henri IV, étant substitué au duc de Bellegarde, n’aurait pu jouer un rôle digne de lui. Il aurait été obligé d’entrer dans des détails qui ne conviennent point du tout à sa dignité. De plus, tout ce que le duc de Bellegarde dit de son maître est bien plus à l’avantage de ce grand homme que si Henri IV parlait lui-même.
Enfin il est nécessaire que celui qui fait le dénoûment de la pièce soit un parent de la maison ; et voilà pourquoi j’ai restitué les vers qui fondent cette parenté au premier acte[2] ; ils sont d’une nécessité indispensable.
Je n’ai encore rien écrit sur mon cher Henri IV, mais j’ai tout dans ma tête ; et, s’il arrivait que la mémoire de ce grand homme fût assez chère aux Français pour qu’ils pardonnassent aux fautes de ce petit ouvrage ; si, malgré les cris des Fréron et des autres Welches, il s’en faisait une autre édition après celle de Genève, je vous enverrais une petite diatribe sur Henri IV[3] ; vous n’auriez qu’à parler.