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CORRESPONDANCE.

vement la lettre de l’électeur est du style de Ramsay, et ce Ramsay était un peu enthousiaste. Cependant feu M. le cardinal d’Auvergne m’a fait l’honneur de me dire plusieurs fois que le cartel était vrai, et M. le grand prieur de Vendôme disait qu’il en était sûr. Les historiens et le public aiment ces petites anecdotes.

Je me flatte que vous mettrez le comble à votre générosité, en me faisant part de la lettre de Louis XIV au cardinal de Bouillon[1] laquelle doit être des premiers jours d’avril ou des derniers de mars 1699. Cette lettre est nécessaire ; elle est le fondement de tout.

Si vous aviez aussi quelques anecdotes intéressantes sur le prince de Turenne, qui donnait de si grandes espérances, et qui fut tué à la bataille de Steinkerque, vous me mettriez en état de déployer encore plus le zèle qui m’attache à cette illustre maison.

J’ai l’honneur d’être, avec tous les sentiments que je vous dois, etc.

7112. — À MADAME NECKER.
28 décembre.

Madame, il faut que j’implore votre esprit conciliant contre l’esprit de tracasserie : ce n’est pas des tracasseries de Genève que je parle ; on a beau vouloir m’y fourrer, je n’y ai jamais pris part que pour en rire avec la belle Catherine Ferbot, digne objet des amours inconstants de Robert Covelle[2]. Il s’agit d’une autre tracasserie que le tendre amour me fait de Paris au mont Jura, à l’âge de soixante-quatorze ans, temps auquel on a peu de chose à démêler avec ce monsieur.

On m’a envoyé de Paris des vers bien faits sur M. Dorat et sa maîtresse[3] ; on m’a envoyé aussi une réponse de M. Dorat très-bien faite ; mais ce qui est assurément très-mal fait, c’est de m’imputer les vers contre les amours et la poésie de M. Dorat. Je jure, par votre sagesse et par votre bonté, madame, que je n’ai jamais su que M. Dorat eût une nouvelle maîtresse. Je leur souhaite à tous deux beaucoup de plaisir et de constance. Mais il me paraît qu’il y a de l’absurdité à me faire auteur d’un petit madrigal qui tend visiblement à brouiller l’amant et la maîtresse, chose que j’ai regardée toute ma vie comme une méchante action.

  1. Relativement à l’affaire du quiétisme. (K.) — Voyez tome XV, page 73.
  2. Voyez page 124.
  3. Voyez une note sur la lettre 7102.