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ANNÉE 1768.

Vire, Le Tellier[1], qu’il existe un Dieu qui punit les tyrans, les calomniateurs et les faussaires, confesseurs des rois. Le coquin, pour réponse à mes arguments, m’aurait fait mettre dans un cul de basse-fosse.

Je ne persuaderai pas l’existence d’un Dieu rémunérateur et vengeur à un juge scélérat, à un barbare avide du sang humain, digne d’expirer sous la main des bourreaux qu’il emploie ; mais je la persuaderai à des âmes honnêtes ; et, si c’est une erreur, c’est la plus belle des erreurs.

Venez dans mon couvent, venez reprendre votre ancienne cellule. Je vous conterai l’aventure d’un prêtre constitué en dignité[2], que je regarde comme un athée de pratique, puisque, faisant tout le contraire de ce qu’il enseigne, il a osé employer contre moi, auprès du roi, la plus lâche et la plus noire calomnie. Le roi s’est moqué de lui, et le monstre en est pour son infamie. Je vous conterai d’autres anecdotes : nous raisonnerons, et surtout je vous dirai combien je vous aime.

7322. — À M. LE PRÉSIDENT DE RUFFEY[3].
Au château de Ferney, ce 27 auguste 1768.

Mon cher président, je vous envoie un ouvrage d’un de vos académiciens, dédié à un autre académicien. Il est vrai que cette dissertation ne regarde ni les fétiches, ni la manière dont on tourne sa langue dans sa bouche[4] ; mais vous êtes juge des procédés autant que des recherches littéraires. Si M. de Brosses veut vous prendre pour arbitre, je m’en remets à votre jugement. S’il ne le veut pas, je mets tout sur sa conscience. S’il se laissait conduire par vous, je m’en rapporterais à son honneur.

Adieu, mon cher ami, conservez un peu de bonté pour votre ancien serviteur.

  1. Voyez tome XV, page 53 ; XVII, 177 ; XVIII, 379 ; XXI, 416 ; XXIV, 102, 256, 337, 535.
  2. Biord, évêque d’Annecy ; voyez les lettres 7234, etc.
  3. Éditeur, Th. Foisset.
  4. Allusion au Traité de la Formation mécanique des langues, par M. de Brosses.