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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome47.djvu/474

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CORRESPONDANCE.

plains, je vous pardonne, et je vous souhaite tout ce que la nature et la destinée vous refusent aussi bien qu’à moi.

Pardonnez-moi de même l’affliction que je vous témoigne, en faveur de l’attachement qui ne finira qu’avec ma vie, laquelle finira bientôt.

8319. — À M. CRAMER.

Je viens d’ouvrir, pour la première fois, le dix-huitième volume[1] de mes prétendues Œuvres complètes. Si vous m’aviez consulté, je vous aurais prié de me laisser faire un choix, et de ne pas vous ruiner à donner tant d’ouvrages indignes d’être lus. Je vous ai dit plus d’une fois[2] qu’on ne va point à la postérité avec un si prodigieux bagage ; vous ne m’avez pas voulu croire. Mais pourquoi ajoutez-vous à mes rapsodies d’autres rapsodies qui ne sont pas de moi ? pourquoi, par exemple, imprimez-vous une lettre à un M. de B***, que je n’ai pas l’honneur de connaître pourquoi m’imputez-vous des vers tels que ceux qui sont à la page 446 ? J’ai arraché cette feuille, et je vous la renvoie : vous en rougirez.

Vous ne voulez pas me rendre ridicule, et déshonorer votre presse. Y a-t-il un moyen de sauver votre honneur et le mien ? ce serait de faire des cartons, et de tâcher de substituer quelque chose de passable aux impertinences barbares qu’on m’attribue.

Si vous saviez combien on méprise tout ce fatras de petits vers de société, vous ne vous donneriez pas la peine honteuse de les recueillir.

Quelle rage et quel intérêt mal entendu ! Ne vaut-il pas mieux resserrer un volume que de l’augmenter par des inepties qui le décréditent ? On a imprimé à Lausanne, sous mon nom, trente pièces de vers que le cocher de Verthamon[3] désavouerait. On croit, parce que vous êtes mon voisin, que c’est moi qui dirige

  1. C’est en 1771 que parut le dix-huitième volume de l’édition in-4° des Œuvres de Voltaire, et c’est à la page 446 que sont les vers contenus dans la Réponse à M. D. B. C’est donc par erreur que jusqu’à présent on a placé à 1768 cette lettre à Cramer. Mais pour la justification de mes prédécesseurs, je dois dire qu’en 1768, dans le cinquième volume des Nouveaux Mélanges, avaient été insérés, page 325, les vers que Voltaire désavoue ici, et qu’il désavoue de nouveau dans une note de son Dialogue de Pégase et du Vieillard. (B.) — Voyez une note sur la lettre 7587, tome XLVI, page 373.
  2. Voyez tome XLVI, page 75. Il le répéta en 1773, dans le Dialogue de Pégase et du Vieillard ; voyez les vers 71 et 72 de cette pièce, tome X.
  3. Voyez la note de M. Ravenel, tome IX, page 19.