On est donc, mon héros, à Paris comme à Rome, parents contre parents[1]. La différence est qu’il s’agissait chez les Romains de l’empire du monde et de ses bribes, et que chez les Welches il ne s’agit, comme à leur ordinaire, que de billevesées. Je crois pourtant que s’il y a un bon parti, vous l’avez pris : et ce qui me persuade que ce parti est le meilleur, c’est qu’il n’est pas assurément le plus nombreux.
Je me trouve, monseigneur, réformé à votre suite dans ma chétive petite sphère. J’ai deux neveux[2] qui ont chacun un grand crédit dans l’ancien et le nouveau parlement. J’ai donné mon suffrage au nouveau, mais je n’y ai pas eu grand mérite. Il y a longtemps que les Calas, les chevaliers de La Barre, les Lally, etc., m’ont brouillé avec les tuteurs des rois[3] ; et j’ai toujours mieux aimé dépendre du descendant de Robert le Fort, lequel descendait par les femmes de Charlemagne, que d’avoir pour rois des bourgeois mes confrères. Je suis bien sûr que toute leur belle puissance intermédiaire, l’unité, l’indivisibilité de tous les parlements, ne m’auraient jamais fait rendre un sou des deux cent mille livres d’argent comptant que M. l’abbé Terray m’a prises un peu à la Mandrin, dans le coffre-fort de M. Magon. Je lui pardonne cette opération de housard, s’il ne nous prend pas tout le reste.
C’est surtout cette aventure qui a dérangé ma pauvre colonie. Elle était née sous la protection de M. le duc de Choiseul, elle est tombée avec lui. On avait établi chez moi trois manufactures qui travaillaient pour l’Espagne, pour la Turquie, pour la Russie. Il était assez beau de voir entrer de l’argent en France par les travaux d’un misérable petit village. Tout cela va tomber, si je ne suis pas secouru. Les secours que je demandais n’étaient que le payement de ce qu’on me doit, et qu’on avait promis de me payer. Je profiterai de vos bontés. J’écrirai à M. l’abbé de Blet[4].