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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome48.djvu/133

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n’a jamais vue. Vous pourriez la lui envoyer sous le contre-seing de M. de Sauvigny, dont vous vous êtes servi quelquefois.

Ce n’est point contre les Questions sur l’Encyclopédie que M. l’évêque de Tréguier[1] devrait être en colère, mais contre ceux qui ont abusé de son nom pour imprimer une Lettre de Jésus-Christ. Je ne doute pas que Jésus-Christ n’ait écrit cette lettre ; mais, dans les règles de l’honnêteté, on ne publie jamais les lettres d’un homme sans sa permission. À l’égard des miracles que vous avez vus à Paris chez un cabaretier, rue des Moineaux, ces messieurs sont dans l’habitude d’en faire tous les jours depuis les noces de Cana, et les convulsionnaires en ont fait pendant vingt ans de suite dans les cabarets et dans les cimetières.

8572. — À M. LE COMTE DE MORANGIÉS.
À Ferney, 6 juillet.

Monsieur, l’auteur de l’Essai sur les Probabilités[2] devait être absolument impartial. Il n’en était pas moins convaincu de la scélératesse de vos adversaires. Son indignation contre eux augmentait encore par le souvenir des bontés que madame votre grand’mère avait eues pour lui et pour toute sa famille. La justice de votre cause me paraît démontrée. Vous n’avez contre vous que la malheureuse facilité d’avoir fait des billets pour une somme très-considérable à des fripons qui se servent avantageusement de ces armes que vous leur avez fournies. Je suis persuadé que si cette affaire était restée entre les mains de M. de Sartine[3], il y a longtemps que tout aurait été pleinement éclairci. Je crains que vos preuves ne périssent avec le temps, et que vous ne restiez chargé de ces billets funestes. C’est encore un grand malheur pour vous, monsieur, d’avoir voulu évoquer cette affaire au conseil, comme si vous vous étiez défié de la justice du parlement, auquel elle ressortit de droit. Je ne doute pas que vous ne rassembliez avec la plus grande diligence tout ce qui peut vous servir dans une conjoncture aussi importante et aussi épineuse. On vient de juger à Lyon une affaire à peu près semblable : le porteur des billets exigibles a été condamné aux galères.

M. Marin m’a mandé qu’il avait vu chez M. de Saluces un do-

  1. Voyez, tome XX, la seconde section de l’article Superstition, qui faisait partie de la huitième partie des Questions sur l’Encyclopédie.
  2. Tome XXVIII, page 495.
  3. Lieutenant général de police ; voyez tome XLI, page 244.