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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome48.djvu/253

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année 1772.

employé dans vos armées, et que je voudrais que, par ses services et par son avancement, il pût confondre les tigres-singes qui ont été coupables envers lui d’un si exécrable fanatisme. Je voudrais le voir à la tête d’une compagnie de grenadiers dans les rues d’Abbeville, faisant trembler ses juges et leur pardonnant. Pour moi, je ne leur pardonne pas ; j’ai toujours cette abomination sur le cœur ; il faut que je relise quelques-unes de vos épîtres en vers pour reprendre un peu de gaieté.

Je me mets à vos pieds, sire, avec l’enthousiasme que j’ai toujours eu pour vous.

Le vieux Malade.
8705. — À M. D’ALEMBERT.
8 décembre.

J’ai pensé, mon cher ami, qu’il faut un successeur à Thieriot[1] auprès du roi de Prusse. Je suppose que le prophète Grimm est déjà en fonction ; mais si cela n’était pas, si ce grand prophète[2] était employé ailleurs, il me semble que cette petite place conviendrait fort à frère La Harpe, et que le roi de Prusse serait bien content d’avoir un correspondant littéraire aussi rempli de goût et d’esprit. Je crois que personne n’est plus en état que vous de lui procurer cette place ; et si la chose est praticable, vous y avez déjà songé. J’en ai écrit un petit mot au roi[3].

Voudriez-vous bien me mander où l’on en est sur cette petite affaire ?

Vous souvenez-vous d’un nommé d’Étallonde, fils de je ne sais quel président d’Abbeville, à qui on devait pieusement arracher la langue, couper la main droite, et appliquer tous les agréments de la question ordinaire et extraordinaire ; après quoi il devait être brûlé à petit feu, conjointement avec le chevalier de La Barre, petit-fils d’un lieutenant général des armées du roi ; le tout pour avoir chanté une chanson gaillarde, et n’avoir pas ôté son chapeau devant une procession de capucins

  1. Voyez page 236.
  2. Allusion à l’opuscule de Grimm intitulé le Petit Prophète de Bochmischbroda, 1753, in-8o.
  3. Dans la lettre qui précède, Voltaire parle de la difficulté de remplacer Thieriot ; mais il ne souffle mot de La Harpe. Il n’en parle pas non plus dans la lettre du 22 décembre. Cependant le roi de Prusse parle de La Harpe dans sa lettre du 16 janvier (No 8736). Il y a donc une lettre de perdue, ou quelque phrase de supprimée dans les lettres imprimées. (B.)