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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome48.djvu/280

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CORRESPONDANCE.

nieuses. Je ne connais guère la musique de Corelli. J’entendis autrefois une de ses sonates, et je m’enfuis, parce que cela ne disait rien ni au cœur, ni à l’esprit, ni à mon oreille. J’aimais mille fois mieux les Noëls de Mouton et Roland Lassé.

Ce Corelli est bien postérieur à Lulli, puisqu’il mourut en 1734. Si vous voulez avoir un modèle de récitatif mesuré italien avant Lulli, absolument dans le goût français, faites-vous chanter par quelque basse-taille le Sunt rosæ mundi breves[1] de Carissimi. Il y a encore quelques vieillards qui connaissent ce morceau de musique singulier. Vous croirez entendre le monologue de Roland au quatrième acte.

Vous pouvez d’ailleurs trouver quelques contradicteurs ; mais vous ne trouverez que des lecteurs qui vous estimeront.

J’attends avec impatience la traduction des Odes d’Horace. Il est juste que je présente à ce traducteur si digne de son auteur, et à son aimable frère, une certaine épître à cet Horace, que vous n’avez vue que très-incorrecte.

Mme Denis vous fait mille compliments. Le vieux bavard qui a osé écrire à Horace vous aime de tout son cœur.

8730. — À M. D’ALEMBERT.
Du 9 janvier.

Raton tire les marrons pour Bertrand, du meilleur de son cœur ; il prie Dieu seulement qu’il n’ait que les pattes de brûlées. Il compte que, vous et M. de Condorcet, vous ferez taire les malins qui pourraient jeter des soupçons sur Raton ; cela est sérieux au moins.

J’ai deux grâces à vous demander, mon cher et grand philosophe la première est de vouloir bien me faire envoyer sur-le-champ, et sous l’enveloppe de Marin, ou sous quelque autre contre-seing, la dissertation de M. de La Harpe sur Racine, qu’on dit un chef-d’œuvre.

La seconde, c’est de me dire comment se nommait le curé de Fresne. Il y a une fameuse prière à Dieu d’un curé de Fresne du temps de M. d’Aguesseau. Ce bon prêtre parle à Dieu, avec effusion de cœur, de la tolérance qu’on doit à toutes les religions, et qu’elles se doivent toutes les unes aux autres, attendu qu’elles sont tout à fait ridicules ; mais, pénétré de l’amour de

  1. Premiers mots d’une cantate latine du cardinal Delphini, dont Voltaire rapporte les dix-sept premiers vers, tome XVII, page 426.