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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome48.djvu/393

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année 1772.

tient à des choses qui sont essentielles pour moi, et même pour ma famille.

Nous vous prions de vouloir bien ajouter aux bons offices que nous vous demandons celui de parler de vous-même à mon perfide ; d’ignorer avec lui que nous vous avons écrit ; de lui dire que vous ne venez lui représenter son inconstance que sur le bruit public, et que vous ne sauriez souffrir qu’on attaque ainsi sa gloire.

Franchement, madame, rien n’est plus cruel que de se voir abandonné et trahi sur la fin de sa vie par les personnes sur lesquelles on avait le plus compté, et dans qui on avait mis toutes ses affections. Il n’y a que vos bontés qui puissent me consoler, et me tenir lieu de ce que je perds.

J’ai l’honneur de vous envoyer un exemplaire de la pièce en question, avec des notes que je vous prie de lire quand vous n’irez point à la chasse.

Agréez, madame, mon respect et mon attachement inviolable.

8850. — À M. D’ALEMBERT.
À Ferney, 20 mai.

Ce que vous m’avez mandé, mon cher ami, est très-vrai, et beaucoup plus fort qu’on ne vous l’avait dit. Ces conseils et ces souhaits ont été regardés comme une injure. Il vaudrait beaucoup mieux se corriger que de se fâcher. Il arrive fort souvent que ce qui devrait faire du bien ne produit que du mal. Que vous dirai-je, mon cher philosophe ?


Monsieur l’abbé et monsieur son valet
Sont faits égaux tous deux comme de cire[1].


Il n’y a d’autre parti à prendre que celui de cultiver librement les lettres et son jardin, et surtout l’amitié d’un cœur aussi bon que le vôtre, et d’un esprit aussi éclairé.

Je ris des folies des hommes et des miennes.

À propos de folies, on m’a mandé que la moitié de Paris croyait fermement que, ouï le rapport de M. de La Lande, une comète[2] passerait aujourd’hui, 20 de mai, au bord de notre globule, et le mettrait en miettes. Il y a bien longtemps que les

  1. Marot, épigramme LXXXV.
  2. Voyez l’opuscule de Voltaire à ce sujet, tome XXIX, page 47.