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534 LA GUERRE CIVILE DE GENÈVE.

C'est sa Circé, sa Didon, son Alcine, L'aversion pour la terre et les cieux Tient lieu d'amour à ce couple odieux. Si quelquefois, dans leurs ardeurs secrètes, Leurs os pointus joignent leurs deux squelettes, Dans leurs transports ils se pAment soudain Du seul plaisir de nuire au genre humain.

Notre Euménide avait alors en tête De diriger la foudre et la tempête Devers Genève. Ainsi l'on vit Junon, Du haut des airs, terrihle et forcenée, Persécuter les restes d'il ion, Et foudroyer les compagnons d'Énée. Le roux Rousseau, renversé sur le sein, Le sein pendant de Tinfernale amie. L'encourageait dans le nohle dessein De submerger sa petite patrie : 11 détestait sa ville de Calvin; Hélas! pourquoi? c'est qu'il l'avait chérie.

Aux cris aigus de l'horrible harpie. Déjà Borée, entouré de glaçons, Est accouru du pays des Lapons ; Les aquilons arrivent de Scythie ; Les gnomes noirs, dans la terre enfermés Où se pétrit le bitume et le soufre, Font exhaler du profond de leur gouffre Des feux nouveaux dans l'enfer allumés : L'air s'en émeut, les Alpes en mugissent ; Les vents, la grêle, et la foudre, s'unissent ; Le jour s'enfuit ; le Rhône épouvanté Vers Saint-Maurice^ est déjà remonté ;

��chine. (Note de Voltaire, 1768.) — Il n'est pas difficile de voir que, sous le nom de Vachinc, Voltaire désigne Tiicrèso Levasseur, d'abord gouvernante puis femme de J.-J. Rousseau. (B.)

1. Saint-Maurice dans le Valais, à quelques milles de la source du Rhône. C'est en cet endroit que la légende a prétendu que Diocléticn, en 287, avait fait martyriser une légion composée de six mille chrétiens à pied, et de sept cents chrétiens à cheval, qui arrivaient d'Egypte par les Alpes. Le lecteur remarquera que Saint-Maurice est une vallée étroite entre deux montagnes escarpées, et qu'on ne peut pas y ranger trois cents hommes en bataille. Il remarquera encore qu'en '287 il n'y avait aucune persécution; que Dioclétien alors comblait tous les chrétiens de faveurs; que les premiers officiers de son palais, Gorgonios et Dorotheos, étaient chrétiens, et que sa femme Prisca était chrétienne, etc. Le lecteur observera surtout que la fable du niar-

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