Page:Wash Irving voyage dans les prairies.djvu/188

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chacun songeait maintenant à manger, et sur ce point tous les estomacs étaient à l’unisson dans le camp. Tony nous servit le régal promis, de soupe et de rôti de buffle. La soupe était horriblement poivrée, et le rôti avait sans doute fait partie d’un taureau patriarche des prairies. Jamais je ne broyai sous mes dénis une viande plus coriace ; mais c’était la première fois que nous tâtions de cette chair renommée ; la foi suppléait au goût, et notre petit cuisinier ne nous laissa point de repos qu’il ne nous eut fait avouer l’excellence de son apprêt, en dépit du démenti que le poivre donnait dans notre gorge à cet aveu complaisant.

La nuit était close, et le vieux Ryan et ses compagnons n’étaient pas encore revenus ; mais on était accoutumé aux aberrations de ce coq des bois, et l’on ne montra aucune inquiétude sur son compte. Après les fatigues et les agitations de la journée, le camp fut bientôt plongé dans un profond sommeil, excepté les sentinelles, qui se tinrent sur leurs gardes avec plus de vigilance que de coutume, en raison des traces de Pawnies récemment vues, et de la certitude que nous étions au milieu de leur territoire de chasse. Vers dix heures et demie, une nouvelle alarme