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VOYAGE DANS LES PRAIRIES

Et le chasseur d’abeilles ne profitait pas seul de la ruine de cette industrieuse communauté. Pour compléter l’analogie de leurs habitudes à celles des hommes laborieux et avides de gain, ces mouches ne négligent point de s’enrichir par le malheur de leurs semblables : je vis arriver à tire d’ailes un grand nombre d’essaims des ruches voisines qui se plongèrent dans les cellules des rayons brisées avec la joyeuse avidité de riverains se jetant sur un bâtiment naufragé, puis s’envolèrent chargées de butin. À l’égard des propriétaires de la ruine, elles ne paraissaient avoir cœur à rien, pas même à goûter au nectar qui coulait autour d’elles ; mais on les voyait se traîner tristement et nonchalamment, comme j’ai vu parfois un pauvre malheureux regarder, les mains dans ses poches, en sifflant, d’un air distrait et découragé, les décombres de sa maison incendiée.

Il est difficile de décrire l’ébahissement, la confusion des abeilles de la ruche en banqueroute, qui se trouvaient absentes lors de la catastrophe, et arrivaient de temps en temps avec leur cargaison. D’abord, elles décrivaient des cercles en l’air autour de l’ancienne place de l’arbre, étonnées de la trouver vide. Enfin,