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Page:Whitman - Feuilles d’herbe, trad. Bazalgette.djvu/271

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CHANT DE L’EXPOSITION 263

Monde étranger, émaillé, éblouissant, avec tous ses mythes, légendes somptueux,

Ses rois et fiers castels, ses prêtres et seigneurs guerroyeurs et nobles dames,

Descendu au caveau sépulcral, mis en bière revêtu de la cou­ronne et l’armure,

Avec la pourpre des pages de Shakespeare pour blason,

Et, pour hymne funèbre, les doux vers mélancoliques de Tennyson.

Je vous répète, amis, que je vois, si vous point, l’illustre émigrée (ayant, il est vrai, dans sa journée, quoique toujours la même, considérablement changé et voyagé),

Se diriger tout droit vers ce rendez-vous, se frayer vigoureu­sement un chemin, marcher à grands pas à travers la confusion,

Point attérée par le cognement des machines ni leurs sifflets aigus,

Pas le moins du monde rebutée par les tuyaux d’égout, gazomètres, engrais artificiels,

Souriante et heureuse avec l’intention visible de rester,

La voici, installée parmi la batterie de cuisine !

4

Mais un instant — N ’oublié-je pas les convenances ?

De présenter l ’étrangère (suis-je au monde pour chanter autre chose ?) à toi, Amérique ;

Au nom de la liberté, salut, immortelle ! Serrez-vous la main,

Et qu’à partir de ce jour vous soyez à jamais l’une pour l’autre chères sœurs.