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Page:Whitman - Feuilles d’herbe, trad. Bazalgette.djvu/71

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Sur la place passent se donnant le bras trois femmes d’âge, imposantes et amies,
L’équipage de la barque de pêche entasse les flétans dans la cale en couches épaisses,
Le Missourien traverse les plaines en transportant sa mar­chandise et ses bestiaux,
Le receveur passe dans les voitures du train et avertit les voyageurs en faisant tinter la menue monnaie,
Les parqueteurs posent le plancher, les ferblantiers posent le fer-blanc de la toiture, les maçons réclament du mortier,
À la file, chacun portant l’auge sur ses épaules, s’avancent les aides ;
Les saisons se succèdent et la foule indescriptible est réunie, c’est le quatre juillet (quelles salves de canon et mousqueterie !)
Les saisons se succèdent, le laboureur laboure, le faucheur fauche, et le grain d’hiver tombe en terre ;
Là-bas, sur les lacs, le pêcheur de brochet attend, l’œil aux aguets, près du trou creusé dans la glace,
Les souches s’entassent autour de la clairière défrichée, le colon frappe dur avec sa hache,
Les bateliers s’amarrent à la brune auprès des peupliers ou des noyers,
Les chasseurs de ratons parcourent les régions de la rivière Rouge ou celles que draine le Tennessee, ou celles de l’Arkansas,
Des torches brillent dans les ténèbres qui enveloppent le Chattahooche ou l’Altamahaw,
Des patriarches sont assis à la table du souper avec leurs fils et petits-fils et arrière-petits-fils autour d’eux,
Derrière des murs de torchis, sous des tentes de toile, se re­posent chasseurs et trappeurs après leur journée de chasse,